Le cinéaste chilien Andrés Wood signe un ambitieux thriller politique sur son pays natal, marqué au fer rouge par les années de dictature. Il appartient à la génération qui n’a connu l’Unité Populaire et le coup d’État que comme enfant. Ce film puissant est à découvrir sur OCS cette semaine.
Photo : OCS TV
Témoin d’un vol à la tire commis par un jeune délinquant dans les rues de Santiago, Gerardo, un homme mystérieux, poursuit le malfrat au volant de son véhicule et l’exécute froidement. Applaudi par des passants témoins de la scène morbide, de toute évidence partisans de la justice expéditive, cet antihéros macabre est interpellé par la police et ne tarde pas à faire la une des journaux qui instrumentalisent le sinistre fait divers pour vendre du papier. Inès, une femme d’affaires influente, reconnaît sur les photos publiées dans la presse ce Gerardo qu’elle croyait disparu et qu’elle a connu des décennies plus tôt alors qu’elle militait à ses côtés dans les rangs du mouvement d’extrême droite Patrie et Liberté, un groupe violent en guerre contre le gouvernement de Salvador Allende et secrètement soutenu par la CIA. Effrayée à la perspective de voir ce ténébreux passé remonter à la surface, Inès met tout en œuvre pour que l’arrestation de Gerardo ne compromette pas sa bonne réputation dans les sphères de pouvoir.
Instructif et glaçant
Le cinéaste chilien Andrés Wood a connu un succès retentissant dans son pays natal en 2004 avec Mon ami Machuca , un film sélectionné au festival de Cannes dans la section Quinzaine des réalisateurs où il dressait le portrait d’enfants de classes sociales différentes grandissant tant mal que bien dans un Chili traumatisé par l’assassinat d’Allende et le coup d’Etat militaire de Pinochet.
Dans La Toile de l’araignée , son nouveau film inédit dans les salles et disponible sur OCS, le metteur en scène évoque une nouvelle fois les années noires du Chili et signe un thriller politique haletant qui entremêle habilement deux époques : les années 1970 où Inès, Gerardo et leurs camarades luttaient contre « le péril rouge » et la période contemporaine où ces mêmes personnages semblent être restés fidèles à leur idéologie mortifère en fustigeant, entre autres, « le manque d’ordre qui gangrène la société chilienne ». Solidement scénarisé et mis en scène, ce film instructif et glaçant revient en détail sur les agissements du mouvement paramilitaire Patrie et Liberté dans les années 1970 et sur son implication dans le coup d’État contre Allende. Parallèlement, La Toile de l’araignée évoque avec force les ambivalences et contradictions actuelles du Chili face à ce passé qui ne passe pas. Un film de genre qui n’a assurément rien d’anodin.
D’après Les Echos et OCS
La toile de l’araignée. D’Andrés Wood. Chili, 2019. Interprètes: Marcelo Aranda, Felipe Armas, María Valverde, Mercedes Morán, María Gracia Omegna, Mario Horton, Jaime Vadell (performance spéciale) et Pedro Fontaine.