Les Boliviens devaient voter le 3 mai pour élire leurs président, vice-président et des parlementaires, mais la pandémie en a décidé autrement. Aucune date de report n’a été fixée pour le moment car la crise sanitaire oblige les gouvernants à revoir l’ordre des priorités du pays.
Photo : Clarin AR
Le 22 mars dernier, la présidente par intérim, Jeanine Áñez, a annoncé un confinement national total à partir du premier dimanche d’avril afin d’empêcher la propagation du virus. Le 21 mars, vingt cas de personnes infectées avaient été confirmés. Depuis, le nombre de malades a considérablement augmenté. Le 12 avril, le virus avait déjà fait 30 morts, essentiellement à Santa Cruz d’où l’épidémie est partie mais aussi sur les plateaux.
Boliviens et résidents étrangers ne peuvent sortir que pour se ravitailler une fois par semaine, ou s’ils sont dans une situation d’urgence. Les vérifications sont faites à partir du numéro de carte d’identité. Les frontières et les aéroports sont fermés, ce qui a rendu – entre autres – très difficile le rapatriement des touristes, qui a préoccupé durant plusieurs semaines l’ambassade de France. La Bolivie, comme ses voisins, est dans une situation critique qui influence grandement la vie politique du pays.
Il semble évident que la présidente par intérim sera jugée sur sa capacité à gérer la pandémie. Pour l’instant, afin de répondre aux critiques qui ont généré des conflits à la frontière avec le Chili, elle a autorisé les quelque 200 Boliviens coincés à Huara (Chili) à rentrer, à condition de respecter une quarantaine stricte.
En ce qui concerne les élections, dans la foulée du décret présidentiel, le Tribunal suprême électoral avait publié cette déclaration : « La Chambre plénière du Tribunal électoral suprême a pris note de la décision du gouvernement de déclarer une quarantaine avec restriction des activités à partir de demain. Cette mesure, résultat d’une situation sans précédent dans le monde, empêche l’Agence électorale de poursuivre les travaux préparatoires au processus électoral dont le jour du scrutin a été fixé au dimanche 3 mai. Compte-tenu de cette décision , le Tribunal suprême électoral décide, à titre exceptionnel, de suspendre le calendrier électoral, à compter de 00 h le dimanche 22 mars. Dans le même temps, il exprime son engagement à reprendre toutes ses activités dès que les conditions minimales seront remplies. »
Le Tribunal suprême s’est dit convaincu qu’en cette période grave, les acteurs politiques, les institutions et les forces vives de la société sauraient tous résister à l’assaut de l’épidémie et organiser « un processus électoral propre et transparent ». Cela semble particulièrement important dans le contexte extrêmement particulier de l’annulation du scrutin du 20 octobre 2019 qui avait donné gagnant un Evo Morales contraint, le 10 novembre, de démissionner et fuir à l’étranger pour allégations de fraude et de manipulation de la Constitution.
Il reste à souhaiter que soient respectés le consensus et le dialogue avec les principales forces politiques du pays selon des critères d’impartialité comme l’a demandé le président du TSE, Salvador Romero, qui a souligné que la convocation d’une nouvelle date de vote devait s’appuyer sur une loi votée par le Parlement où le MAS, le parti de Morales (qui est réfugié en Argentine) reste majoritaire.
Cependant, dans un pays bien plus préoccupé par le confinement, ces mesures ne sont plus prioritaires. Les différents candidats eux-mêmes se sont à peine prononcés sur les réseaux sociaux à ce sujet alors qu’Evo Morales et son candidat Luis Arce ont pourtant l’habitude d’utiliser ces plateformes pour s’exprimer. Tous, à l’instar du candidat de Comunidad Ciudadana, Carlos Mesa, qui s’est exprimé sur Twitter, se sont dits favorables au report de ces élections cruciales.
Claire DURIEUX