Balamkú, «le temple du dieu jaguar», un sanctuaire souterrain fréquenté il y a plus de mille ans par les Mayas, dans l’antique cité maya de Chichén Itzá (péninsule du Yucátan, Mexique) a été redécouverte par les archéologues mexicains plus de cinquante ans après sa première découverte en 1966. Les scientifiques du projet GAM (Gran Acuífero Maya) de l’Institut national d’anthropologie et d’histoire (INAH) ont annoncé le 19 février dernier avoir jusqu’à présent parcouru environ 460 mètres à travers la grotte pour trouver ce trésor scientifique qui compte sept offrandes, d’innombrables objets en céramique, et plus de 200 brûleurs d’encens, dont beaucoup d’entre eux représentent Tlaloc, le Dieu de l’eau.
Photo : Veme
Dans ce lieu de vestiges extraordinairement conservés, cette découverte contribuera à comprendre l’histoire de Chichén Itzá. La grotte, scellée pendant des siècles, offre une conservation optimale des objets qui «contiennent des informations inestimables sur la formation et la chute de l’antique cité et sur les fondateurs de ce site iconique» a exprimé Guillermo de Anda, directeur du GAM. En effet, les scientifiques espèrent que la datation de ces vestiges permettra d’avoir plus de détails sur l’origine et le mode de vie des Itzá, le peuple maya qui vivait dans la péninsule du Yucátan.
Un demi-siècle plus tard, la redécouverte du site
Il y a cinquante ans, la grotte avait été découverte par la population locale, qui avait alors informé l’INAH. Un chercheur envoyé par l’Institut, Víctor Segovia Pinto, avait remis un rapport technique qui, pour une raison inconnue, ne précisait pas l’entrée de la grotte.
C’est alors que l’an dernier, Guillermo de Anda, qui avait commencé un projet dans la région trois ans auparavant, a découvert la grotte Balamkú en étudiant un gouffre situé à deux kilomètres du temple de Kukulcán. «Ce que nous avons alors découvert était incroyable, rien n’était altéré et un des brûleurs d’encens est même devenu une stalagmite», a raconté Guillermo de Anda, directeur du projet.
Balamkú se situe à 2,7 kilomètres à l’est du temple de Kukulcán. Les scientifiques se questionnent sur la possible relation entre les deux édifices, étant donné la distance qui les sépare. La cartographie 3D et la paléobotanique seront mis en œuvre par les chercheurs du GAM pour réaliser une étude approfondie du site qui permettra de comprendre l’effondrement de la civilisation maya et le déclin de la grande cité de Chichén Itzá au 13e siècle, toujours inexpliqué à l’heure actuelle.
Pourquoi les Mayas ont-ils déposé leurs offrandes dans une galerie si secrète ?
L’hypothèse avancée par les scientifiques du GAM est qu’«au cours de la période de l’époque post-classique (700-1000 après J.C.), le nord de la péninsule du Yucátan a connu un épisode de sécheresse inhabituel qui a obligé les habitants à implorer la pluie en allant dans les entrailles de la terre, dans l’inframonde où règnent les divinités de la fertilité», signale le communiqué de l’INAH.
Les archéologues ont dû ramper pour pouvoir découvrir les sept chambres-sanctuaires identifiées jusqu’à présent. La morphologie tortueuse de la grotte qui ressemble à un «ver», comme la décrit Guillermo de Anda, aurait pu inciter les Mayas à faire les offrandes au plus profond de la galerie afin d’être plus proches des dieux. En langue maya, «Balam» signifie «jaguar» et «Kú» «temple». La grotte Balamkú fait donc référence à cet animal mythique qui conserve un lien étroit avec les divinités associées à l’inframonde, et avec les portes d’accès à ce monde souterrain.
Un serpent corail, gardien de la grotte
Les Mayas habitant toujours au Yucátan ont raconté que le serpent corail était le gardien de la grotte. Et en effet, Guillermo de Anda expliqua qu’un reptile de cette espèce, qui est parmi les plus venimeux du monde, avait bloqué pendant quatre jours l’accès de la grotte aux scientifiques. Respectant la demande des Mayas vivant près du site de Chichén Itzá, les archéologues ont procédé pendant six heures à une cérémonie spirituelle d’expiation afin d’éviter qu’un drame ne se produise en pénétrant dans la grotte.
Alexandra JAUMOUILLÉ