Après l’approbation de l’Assemblée générale à l’unanimité de ses 139 États membres, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a nommé Mme Michelle Bachelet, ancienne présidente du Chili, Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme.
Photo : Radio-Canada
Ayant achevé, en mars dernier, son second mandat de présidente du Chili (2014-2018), Michelle Bachelet prend la direction de l’un des organismes les plus prestigieux de l’ONU. Elle succède à M. Zeid Ra’ad Al-Hussein, prince de la Jordanie, contesté pour ses prises de position un peu tranchées sur certaines affaires internationales.
Personnalité dont le leadership est incontesté au Chili et internationalement, Michelle Bachelet a été la première femme à être élue à la tête de l’État chilien entre 2006 et 2010, après avoir été ministre de la Défense (2002). Après son premier mandat, elle était aussi devenue la première Directrice exécutive de l’ONU Femmes. À 66 ans, Michelle Bachelet n’est donc pas une novice des instances onusiennes. Elle a été la première directrice d’ONU Femmes, l’agence des Nations unies promouvant l’égalité entre femmes et hommes, à sa création, en 2010.
«Elle prend ce poste à une période ayant de graves conséquences sur les droits humains», a déclaré António Guterres, secrétaire général de l’ONU, quelques instants après l’officialisation de sa nomination, qui se réjouit de la nomination de Michelle Bachelet, «pionnière, une visionnaire, une femme de principes et une extraordinaire leader des droits de l’homme pour ces temps difficiles».
Reconnue défenseure des droits de l’homme, Mme Bachelet est un médecin-pédiatre qui est entrée au gouvernement du président Ricardo Lagos comme Conseillère au ministère de la Santé, puis est devenue la première femme chilienne à diriger ledit ministère en 2000 et, plus tard, en 2002, celui de la Défense.
Dans les années 1970, elle fut militante socialiste et des droits de l’homme, ce qui lui a valu à elle et à ses parents le statut de prisonniers politiques. Elle a été détenue et torturée avec sa mère par la police politique du dictateur en 1975. Son père, Alberto, général de l’armée de l’air opposé au général Pinochet, fut arrêté à la suite du coup d’État militaire en 1973, et mourut en prison. Après leur libération, Mme Bachelet et sa mère ont passé plusieurs années en exil en Allemagne. Elle est revenue au Chili en 1979, a achevé ses études de médecine commencée en exil et a participé, au sein d’une institution, aux progrès dans la santé infantile et publique. Titulaire d’un diplôme de médecine, elle a également étudié la stratégie militaire à l’Académie chilienne de la Stratégie et des Politiques et à l’Inter-American Defense College des États-Unis.
«Profondément honorée par cette nomination», Michelle Bachelet a remercié par un tweet la confiance du Secrétaire général de l’ONU António Guterres, et a annoncé qu’à partir du 1er septembre, elle assumera cette nouvelle étape de sa vie et se prépare déjà à accomplir ce très important nouveau rôle. La Communauté d’États latino-américains et caraïbes, représentée par l’ambassadeur argentin auprès de l’ONU, Martín García Moritán, se félicite de cette nomination.
Lorsqu’elle prendra ses fonctions, Michelle Bachelet aura pour mission d’apaiser les tensions nées des positions contestées de son prédécesseur, Zeid Ra’ad Zeid Al-Hussein, qui a souvent provoqué la controverse, perdant ainsi le soutien de plusieurs pays influents. Il avait, par exemple, qualifié le Premier ministre hongrois Viktor Orbán de «raciste» et le président américain Donald Trump de «dangereux». Cela l’a poussé à ne pas solliciter de second mandat, notamment après les critiques acerbes des États-Unis, de la Russie et de la Chine au cours de ses quatre années à la tête de l’institution.
«Si elle est choisie, Michelle Bachelet aura sous sa responsabilité l’une des charges les plus difficiles au monde, à un moment où les droits de l’homme subissent une attaque généralisée», estimait, avant l’annonce d’António Guterres, le directeur de Human Rights Watch, Kenneth Roth. «En tant que victime elle-même, elle amène à ce rôle une perspective unique sur l’importance d’une défense vigoureuse des droits humains», ajoute-t-il, faisant allusion aux souffrances endurées par l’ancienne présidente chilienne sous la dictature d’Augusto Pinochet.
Cette fonction est considérée comme l’une des plus complexes au sein de l’ONU et ses dirigeants ont été assez souvent la cible de critiques et de pressions. Michelle Bachelet, personnalité charismatique, a des convictions fortes sur la défense des droits de l’homme, elle l’a démontré en étant à la tête de l’ONU Femmes. Elle a une véritable vision politique et saura sûrement concilier le sens de l’autorité, de la justice, avec celui de la modération et de la bienveillance pour traiter les enjeux les plus difficiles.
Olga BARRY