Dans son nouveau roman, Desastres naturales (Catastrophes naturelles), paru en mai 2017 aux éditions Alfaguara, l’écrivain chilien part à la recherche du sens de l’appartenance et de l’identité à travers un récit sur la masculinité dans lequel le protagoniste évoque son homosexualité et sa relation avec son père, en pleine dictature de Pinochet. Auteur de Madre que estás en los cielos, La soberbia juventud, ou encore Jardín, Pablo Simonetti approfondit, dans Desastres naturales, les deux thèmes principaux qui parcourent son œuvre : l’identité et l’appartenance. Il y donne la parole à un jeune homme homosexuel dans le Chili de Pinochet.
Photo : Pablo Simonetti / Éd. Alfaguara
Sous couvert de fiction, à travers un personnage, Marco, inspiré de Simonetti lui-même, l’auteur s’interroge sur la difficulté à trouver sa place dans le monde et évoque la délicate cohabitation entre appartenance et identité. « Moi, j’ai du m’éloigner peu à peu de mes mondes d’appartenance pour trouver ma place », explique Simonetti. Dans un pays qui laissait alors peu de place aux nuances et aux différences, « la vie des homosexuels était très difficile ». Avec Desastres naturales, c’est en réalité son propre père que Simonetti tente de comprendre, en « se plongeant dans ce temps, dans cette époque, dans les sensations et les menaces qu’il a pu sentir » parce qu’il « a dû vivre une époque dans laquelle dominaient d’autres idées sur la sexualité, le genre, la politique ». Le Chili, dit-il, « a toujours été machiste et hétéropatriarcal, mais la dictature a aggravé ces sentiments », parce que ces valeurs ont été transmises par le « système nerveux communicationnel » du régime, qui en a imprégné toute la société chilienne.
Maintenant que son pays s’est modernisé, Simonetti croit avoir trouvé les mots pour raconter ce qui demeurait enseveli jusqu’alors. « Au Chili, nous avons beaucoup évolué. Nous avons une loi d’union civile, à laquelle j’ai participé activement, et le Congrès étudie l’approbation du mariage homosexuel », continue t-il. Mais l’écrivain nous met en garde : « Les libertés sont toujours fragiles. Il suffit que le langage de la société se polarise, et l’autocratie ou les attitudes fascistes se développent, et on met en place des modes de vie exemplaires pour que les libertés soient sacrifiées. Nous avons l’exemple de la Russie, où tu ne peux plus te promener main dans la main avec ton partenaire, ou les États-Unis, qui, avec Trump, limitent l’accès des personnes LGTB à l’armée. N’oublions pas comme il est facile de tout perdre, et comme sont tentants les discours totalitaires qui peuvent nous faire sentir protégés et pensent qu’ils peuvent discriminer les minorités ».
Léa JAILLARD
D’après El Diario Montanes (Espagne) et El Mostrador (Chili)