Le conflit entre Lenín Moreno, l’actuel président, et Rafael Correa, un « twitter acharné », avec de fréquents échanges de reproches et d’insultes sur les réseaux sociaux, s’est intensifié au fil des mois, alors que le président critique et discrédite la gestion de son prédécesseur, dont il a été le vice-président de 2007 à 2013.
Photo : Lenin/Wikimedia, Lenín Moreno – Rafael Correa
Le mouvement de gauche, qui depuis l’arrivée de Moreno au pouvoir le 24 mai, est profondément divisé entre les partisans de Moreno et ceux de Correa, accuse le président de gouverner avec le programme de l’opposition. La crise politique s’inscrit aussi dans le contexte des graves accusations de corruption lancées contre le vice-président Jorge Glas, allié de Correa, actuellement en détention préventive pour le dossier des pots-de-vin de la société de construction brésilienne Odebrecht, et qui a déclaré dans une interview exclusive accordée à CNN en espagnol, depuis la prison, qu’il était « l’objet de persécution » par le gouvernement de son pays, sous la forme d’une surveillance extra judiciaire par le service de Renseignement.
Lenin Moreno, a été évincé le 31 octobre au sein de son parti Alianza País (AP)
« Lenin Moreno […] perd immédiatement ses fonctions de président du parti », a annoncé un communiqué de la direction nationale de Alianza País, qui demande à l’ex-président équatorien Rafael Correa (2007-2017) d’accompagner son processus de « restructuration ». « Le règlement interne considère comme une faute grave, entre autres, les actions politiques qui profitent objectivement à des personnes ou groupes opposés à la politique de la Révolution Citoyenne », est-il précisé dans le communiqué lu par la secrétaire exécutive, Gabriela Rivadeneira.
Alors que Moreno n’est pas intervenu publiquement après la décision de l’AP, les ministres ont, dans une brève déclaration, ignoré le renvoi de Moreno, qu’ils ont décrit comme «si arbitraire» qu’il ne reflète pas le «sentiment» des bases du parti. « Ils savent très bien que le président d’Alianza País, comme tous ses dirigeants nationaux, sont élus lors d’une convention nationale […] Nous regrettons cette décision, et nous continuerons à travailler en tant que militants de notre organisation », a déclaré Miguel Carvajal (Ministre de la Défense). « Nous avons toujours dit que nous espérions que les différences soient traitées avec un grand esprit démocratique et avec maturité », a t-il ajouté.
Le parti au pouvoir était au bord de la rupture depuis début octobre
Sa date n’est toujours pas fixée. Elle a pour objectif, entre autres, de supprimer le droit à la réélection indéfinie, résultat d’un amendement inconstitutionnel approuvé par la majorité de Correa dans la législature précédente, qui empêcherait donc le retour de Correa au pouvoir en 2021. Une autre des sept questions de la consultation qui échauffe les esprits des «corréistes » est celle qui propose la suppression définitive du CPCCS, le Conseil de la participation citoyenne et du contrôle social ou cinquième pouvoir, fondé par Correa. Les partisans de Moreno estiment qu’être contre la consultation populaire est une attaque contre la démocratie, en empêchant le peuple de s’exprimer.
Correa, accusant Moreno de s’être allié avec l’opposition, de trahir les principes de la soi-disant « révolution citoyenne », et de « porter atteinte à l’unité » du pays, avait en effet averti que si le président « continuait à détruire ce qui avait été accompli », il pourrait « promouvoir une Assemblée constituante pour mettre fin au gouvernement de son successeur, et revenir en tant que candidat ». La décision de la direction nationale de Alianza País d’écarter Lenín Moreno de la présidence du mouvement, et de le remplacer par Ricardo Patiño, ancien ministre des Affaires étrangères de Rafael Correa et ancien conseiller de Moreno lui-même, confirme la lutte interne pour la direction du parti qui a remporté les dernières élections générales, et la lutte pour le pouvoir politique dans le pays.
Lenín Moreno, un nouveau parti, “Somos Ecuador”
Il est né de divers organismes sociaux, dont la liste est longue, favorables à la gestion du président Lenin Moreno et à la consultation populaire qu’il a proposée. S’y associent de nombreux collectifs représentant les femmes, les jeunes, les migrants, les mouvements LGBTI et d’autres mouvements considérés comme des acteurs stratégiques pour le développement de l’Équateur. Selon le communiqué de presse « Nous sommes l’Équateur » représente « des centaines de citoyens ordinaires de différentes tendances, qui veulent un consensus pour un Équateur juste, solidaire, et offrant de nombreuses opportunités ».
Catherine TRAULLE