Fin décembre s’achève l’année France-Colombie. Après un retour en arrière… des lumières sur les dernières semaines

Depuis le mois de janvier 2017, l’Année France-Colombie a su explorer et cultiver les liens qui unissent ces deux pays. Ce festival de grande envergure présente des projets collaboratifs, donne une voix aux artistes contemporains et ouvre des discussions mutuelles sur les héritages et l’avenir des relations franco-colombiennes.

C’est la première Année Croisée organisée en Amérique latine depuis l’année France-Brésil en 2009. La décision d’organiser un tel événement, à l’initiative des présidents colombien et français en 2015, fut encouragée par un contexte politique favorable : l’aboutissement du processus de paix, qui met fin à cinquante-deux ans de guerre en Colombie, promet effectivement des relations bilatérales plus prometteuses avec la France. Ce partenariat réaffirme l’engagement de la France aux côtés du peuple colombien et son soutien à Juan Manuel Santos, qui s’est vu attribuer le Prix Nobel de la Paix en 2016 pour sa politique pacifiste. L’objectif de cette Année, tout en accompagnant cet effort de paix, est d’établir des partenariats durables entre les deux pays par l’intensification et la diversification des domaines d’échange et de coopération. Pour ce faire, la programmation des nombreux événements concerne cette année tous les secteurs (arts, culture, recherche universitaire, économie, commerce, tourisme et sport) et encourage vivement l’implication des collectivités territoriales et des entreprises.

L’Institut Français et le Ministère des affaires étrangères, en charge de l’organisation générale du festival, ont pu exploiter le dynamisme des échanges économiques et culturels déjà à l’œuvre entre les deux pays. Cette Année a débuté par une Saison française en Colombie, de décembre 2016 à juillet 2017, et se poursuit jusqu’en décembre par une saison colombienne en France. À l’occasion des nombreux projets mis en place dans les six premiers mois de l’année, la Colombie a attribué à la France le statut privilégié d’invitée spéciale, entre autres au Festival de musique de Carthagène, au Salon du livre de Bogotá – où de nombreux projets de co-créations ont vu le jour – ou encore au Salons de l’Agriculture et du Tourisme. Nous devons aussi à cette dernière l’organisation sur son territoire d’un événement exclusif : les premières Assises du français en Colombie.

Concernant le revers commercial de cette Saison croisée, le Ministère de l’Économie et des Finances a organisé à Paris, en juin dernier, le « Forum économique France-Colombie ». L’événement visait à approfondir cette relation économique bilatérale (déjà 180 filiales françaises implantées en Colombie) et à mieux faire connaître aux entreprises françaises les opportunités d’affaires en Colombie. Il avait aussi vocation à présenter aux entreprises et investisseurs français les avancées importantes pour la stabilité politique et économique de ce pays. Effectivement, depuis 2010, la présidence José Manuel Santos met l’accent sur l’importance du tourisme et de l’attrait économique de la Colombie vis-à-vis des investisseurs étrangers.

Divers cycles de colloque ont par ailleurs été aménagés dans les deux pays depuis le début de l’année, portant sur différentes questions d’actualité et de société comme la sortie de la violence, la ville durable, les femmes et la science… Ces discussions croisées sont d’une importance particulière puisqu’elles participent à enrichir le dialogue, promeuvent un nouveau regard, actuel et pertinent, sur le quotidien et les enjeux des sociétés colombienne et française, dans un contexte de coopération universitaire en pleine croissance. La mobilité étudiante bilatérale est encore une fois encouragée, avec diverses bourses et programmes de coopération universitaire, qui ont sans doute déjà participé à faire des étudiants de Colombie la deuxième communauté estudiantine latino-américaine en France. L’Institut Caro y Cuervo, une des entités publiques colombiennes actives dans le cadre des Saisons croisées, a aussi organisé de nombreuses activités en relation avec des sujets d’études divers (le post conflit, le cinéma en Colombie, la littérature d’écrivains d’ascendance africaine…) dans les villes de Paris, Lyon, Toulouse et Bordeaux. Ces projets sont le résultat d’une collaboration avec l’Institut Cervantès et l’Ambassade de Colombie en France.

Parmi les rencontres de fin d’année à ne pas manquer, le colloque « Identité, Mémoire et Représentations » réunira, à l’Université de Nantes du 8 au 10 novembre et à l’Université de Rennes du 16 au 17 novembre, des chercheurs français et colombiens sur le thème de la violence et de la (re)construction d’une identité. Les 34° Assises de la Traduction d’Arles ont, elles aussi, intégré à leur programme du 12 novembre, une table ronde intitulée « Colombie : Mémoires Infidèles », où vous aurez l’occasion d’écouter les Colombiens Octavio Escobar Giraldo, William Ospina en dialogues avec la journaliste Anne Proenza et le traducteur Claude Bleton.

Du côté de l’art, plusieurs villes françaises ont choisi de mettre à l’honneur la musique, la peinture, la gastronomie ou encore la danse colombienne. Le Festival « Sens Interdits », qui s’est déroulé à Lyon fin octobre, a permis d’opérer un éclairage sur le théâtre contemporain colombien, notamment par sa co-production de la dernière création de la compagnie « Mapa Teatro » : La Despedida (mise en scène d’Heidi et Rolf Abderhalden). Cette dernière pièce du triptyque « Anatomie de la violence en Colombie », initié en 2010 et consacré au long conflit armé entre le gouvernement et les Forces armées révolutionnaires colombiennes, a encore quelques représentations à son programme : à Arras du 7 au 8 novembre ; au Théâtre de la Ville à Paris du 13 au 18 novembre ; ou encore au Centre Dramatique National de Montpellier du 28 au 30 novembre. D’autres villes françaises se sont positionnées comme des étapes fortes de la Saison France-Colombie, comme Grenoble ou Toulouse (qui organise le festival « ¡ Locombia ! » du 6 au 10 novembre, avec projections, conférences, expositions, représentations, masterclass et concerts).

Les Nouveaux Espaces Latinos ont eux aussi décidé de prendre part activement à cette Saison, en particulier dans la programmation de la seizième édition de son festival « Belles Latinas », du 8 au 18 novembre dans la région de Lyon. Cinq écrivains colombiens figurent parmi les seize auteurs invités : Gloria Bernal Acevedo (poète, avocate et criminologue spécialisée dans la violence de genre) ; Roberto Burgos Cantor (universitaire, auteur de romans et de contes) ; Myriam Montoya (poète, romancière et traductrice) et les jeunes poètes colombiens Camila Charry et Ronaldo Cano. Par ailleurs, Espaces Latinos organise aussi le 11e festival Documental, du 27 novembre au 2 décembre, l’Amérique latine par l’image. À cette occasion, deux documentaires colombiens seront diffusés à l’Amphi-Opéra de Lyon : Poison contre Poison, de Marc Bouchage ; et Niñas de Ichitu’u, de Helena Salguero.

Toutes les initiatives culturelles ayant pris part à l’événement ont contribué à mieux faire connaitre la Colombie aux Français, à en véhiculer une image actualisée, en donnant un aperçu de l’effervescence de sa culture et du dynamisme de son activité artistique. Elles ont octroyé à de nombreux artistes la possibilité de s’exprimer sur la scène publique et l’opportunité d’échanger, voire de collaborer, avec d’autres artistes internationaux. Cette Année croisée, qui touchera bientôt à sa fin, revêt donc des enjeux majeurs sur les plans politique, économique, universitaire et artistique. En promouvant les richesses culturelles des deux pays en question, les forces économiques et politiques qui sont un enjeu primordial de leurs relations, ainsi que des valeurs de partage et d’ouverture, le festival a su jusqu’à présent, comme l’a affirmé Juan Manuel Santos : « continuer de consolider une relation d’amitié et d’appui mutuel qui dure depuis près de deux siècles ».

Bonnie DUPONT

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