Il y a tout juste cinquante ans, le monde apprenait la mort de Che Guevara. Un peu plus tôt, Régis Debray était arrêté et condamné à trente ans de réclusion par le gouvernement bolivien pour son engagement dans la révolution. Sa fille, Laurence Debray, publie un livre-enquête qui retrace son histoire et celle de ses parents.
Photo éditions Stock
Régis Debray est agrégé de philosophie, ex-castriste et théoricien de la guérilla marxiste-léniniste, il s’envole vers Cuba dans les années 60 pour faire la révolution. Là-bas, il devient le conseiller de Fidel Castro, puis le compagnon de guérilla de Guevara. Il fait de la prison en Bolivie où il sera torturé. Régis Debray est l’auteur de l’essai Révolution dans la révolution ? Lutte armée et lutte politique en Amérique latine (Maspero, 1967), de La Guérilla du Che (Seuil, 1974), ou encore de Journal d’un petit bourgeois entre deux et quatre murs (Seuil, 1976). Debray est un révolutionnaire, un intellectuel et un guerrier, fervent défenseur de la philosophie marxiste et acteur de la révolution. Et c’est ce qui a séduit Élizabeth Burgos, jeune journaliste et historienne au Venezuela, elle aussi engagée dans la révolution. Ils étaient tous les deux proches de Fidel Castro et de Che Guevara en Amérique latine, et de Mitterrand et de Gaulle en France.
Laurence Debray se positionne comme l’exact contraire de ses parents. Fini le temps où « on ne mangeait pas de corn-flakes et on ne buvait pas de Coca-cola parce que c’était américain ». La fille de l’ancien guérillero est une sorte de contre-révolutionnaire. Diplômée de HEC, Laurence se lance dans la finance : elle est trader à Wall Street et actrice des salles de marché du Crédit Lyonnais, puis de HSBC. Elle déteste Chavez et Mélenchon et a publié une biographie de Juan Carlos, roi d’Espagne, son roi de cœur. Dans Fille de révolutionnaires (Stock, 2017), Laurence Debray témoigne de son expérience de la révolution à travers l’engagement de ses parents.
C’est bien Laurence Debray que l’on aperçoit sur la couverture de son roman. Dans un camp pionnier communiste à Cuba, elle a dix ans et se tient bien droite, une arme entre les mains. Sans même ouvrir le livre on entre dans le récit d’une enfance particulière : entre cours idéologiques et entraînements militaires, Laurence a grandi au cœur de la révolution. Pour écrire et décrire au mieux son expérience et celle de ses parents, l’auteure s’est plongée, non seulement dans ses souvenirs d’enfance, mais aussi dans les archives, les images de 1967 et dans le journal du Che afin de récolter un maximum d’informations. Ce livre était aussi l’occasion pour Laurence Debray de démentir une nouvelle fois la rumeur qui accuse son père d’avoir donné des informations sur Che Guevara aux gouvernements américains et boliviens. Ce livre est un témoignage, un livre-enquête, le récit d’un parcours familial et celui d’une révolution.
Marion GONNET
Fille de révolutionnaires de Laurence Debray, coll. La Bleue, éd. Stock, 324 p., 20 €.