Réception à Bogotá en l’honneur de l’ambassadeur Jean-Marc Laforêt

L’ambassadeur Jean-Marc Laforêt quitte son poste à l’ambassade de France en Colombie, qu’il occupait depuis octobre 2013. Ancien élève de l’ENA, il a débuté sa carrière diplomatique en 1992 comme premier secrétaire à l’ambassade de France au Brésil, consul à Sao Paulo de 2001 à 2005, directeur adjoint des Amériques au ministère des Affaires étrangères de 2005 à 2009, ambassadeur de France au Venezuela avant de prendre son poste en Colombie. Le 6 juin dernier, le personnel de l’ambassade a organisé une réception en son honneur à l’occasion de son départ. Nous vous faisons partager ici le discours de M. Thomas Liebault, premier secrétaire de l’ambassade de France en Colombie.

Photo : France diplomatie

« Je vais tâcher de formuler les sentiments du plus grand nombre des agents ici présents pour vos adieux. J’ai réfléchi aux mots qui, à mon avis, permettent de résumer et de se souvenir de vos quatre années de dur labeur en Colombie.  Le premier, c’est celui de « bâtisseur », indéniablement. En quatre ans, dans un pays aussi complexe, parfois imprévisible, sinon indéchiffrable, que la Colombie, vous laissez un héritage marquant. Peu d’ambassadeurs peuvent se targuer d’avoir su faire venir au cours d’une même mission, a fortiori en Colombie, les plus hautes autorités de notre gouvernement : ministre des Affaires étrangères, Premier ministre (pour la première fois), Président de la République après 28 ans d’absence. Mais ce bilan ne se résume pas à cela puisque vous avez contribué à faire advenir trois visites du Président Santos en France et une toute prochaine dans une dizaine de jours à Paris.

Ces multiples visites que vous avez impulsées ont eu, bien sûr, pour objectif stratégique d’appuyer la priorité absolue du gouvernement colombien des négociations de paix avec les FARC. Au-delà de cet engagement politique, l’objectif a été donné du relief, et la Colombie n’en manque certes pas, à nos relations bilatérales, déjà excellentes, enracinées dans l’histoire de l’Indépendance, en matière culturelle, éducative, économique, touristique dans un moment charnière de l’histoire colombienne. Bref, vous avez voulu encourager un moment d’ouverture au monde. C’est l’Année France Colombie que vous avez mise en place avec Anne Louyot.

Le deuxième mot, c’est celui de « principes ». Lord Palmerston disait que l’Angleterre n’avait pas d’amis ou d’ennemis permanents, seulement des intérêts permanents. Vous avez, de votre côté, défendu avec talent les intérêts de la France, avec en tête et au cœur le souci du rayonnement de notre pays et de sa voix particulière. Vous avez défendu les intérêts de nos entreprises en encourageant l’implantation de nouvelles sociétés et l’adoption de traités économiques bilatéraux ; ceux de sa langue et du rayonnement de notre culture ; ceux, plus compliqués, de notre industrie de défense dans une chasse gardée des États-Unis et de ses plus proches alliés. Mais vous avez aussi montré tout le temps que vous étiez ici que la France avait aussi des principes, qui font que notre pays est singulier dans le monde. Vous les avez défendus avec force. Celui de la recherche de la paix par la voie du dialogue politique, et si l’on veut la paix, il faut savoir parler avec ses adversaires ou ses ennemis. Celui des droits de l’Homme, celui d’une conception humaniste de l’économie de marché, à travers les efforts que vous avez entrepris pour encourager la responsabilité sociale des entreprises françaises.

Le troisième et dernier mot, c’est celui de « panache ». Je pense bien sûr au panache blanc de votre chevelure, reconnaissable entre mille !  Mais je pense surtout à ce trait de caractère que l’on associe souvent à la France et aux Français, celui du style et de l’audace qui font de nous un pays que l’on admire et parfois que l’on moque, mais qui font de nous un pays qui ne laisse jamais indifférent et continue de rayonner dans le monde. « Ralliez-vous à mon panache blanc » disait Henri IV : je crois pouvoir dire au nom de mes collègues que votre dynamisme, votre détermination – sabre au clair – et vos talents de chef d’orchestre, ont permis de réussir ces quatre années inoubliables dans un pays souvent frénétique. Vous avez su mobiliser les équipes de l’ambassade et au-delà la communauté française et ses institutions autour de ces grandes étapes que j’ai déjà citées des visites bilatérales et de l’Année France Colombie.

Monsieur l’ambassadeur, Il est temps de conclure. J’aimerais juste dire que si vous avez beaucoup apporté à la France en Colombie, et à la Colombie pour conclure ses négociations de paix, je crois aussi que la Colombie nous a aussi beaucoup apporté à tous. Ce pays est une leçon de choses sur l’homme, cet animal politique et moral, une leçon de choses sur le pire mais aussi le meilleur de l’être humain, sa capacité à faire le mal, à tuer, voler, mentir, mais à faire le bien, par la bonté, l’empathie, l’optimisme. Ce pays et son peuple donnent une épaisseur concrète et puissante à ces notions complexes, parfois devenues abstraites chez nous : les droits de l’Homme ; la justice et l’injustice ; la vérité et le mensonge ; la liberté, l’ordre et l’anarchie ; l’égalité et l’inégalité ; la fraternité et la division ; la haine et le pardon ; le ressentiment et la réconciliation. Ce pays est une magnifique leçon d’humanité qui nous rend meilleur. M. l’ambassadeur, Bueno, au nom de tous les agents, je vous souhaite, à vous et à votre épouse Anne, un bon retour en France. Que nos meilleurs vœux vous accompagnent. »

M. Thomas LIEBAULT*

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