Le Nicaragua s’enfonce petit à petit dans l’autoritarisme. Pour preuve, la destitution le 29 juillet des 28 députés de l’opposition, dont 16 membres de l’Assemblée et 12 suppléants par le Conseil Suprême Electoral (CSE) composé des proches d’Ortega, avec l’aval de l’Assemblée contrôlée par les sandinistes. Les élections présidentielles sont prévues en novembre prochain sans la présence d’observateurs internationaux.
Mais aussi, l’élimination de la limite de deux mandats présidentiels imposée par la Constitution, lui permettant désormais d’être élu à vie ; des portraits géants du leader dans tout le pays ; une police chatouilleuse lorsque l’opposition se manifeste ; le choix de sa femme comme colistière, et la place de ses enfants à des postes clés du pays. Non seulement le CSE a destitué les 28 députés, affiliés au PLI (Parti Libéral Indépendant) et au MRS (parti sandiniste dissident), mais il a interdit à Eduardo Montealegre, leader du PLI, de se présenter à l’élection.
« C’est un fait sans précédent dans l’histoire du pays » ont déclaré les 28 membres du Parlement de l’opposition expulsés par Daniel Ortega, qui ont qualifié cette procédure de « coup d’Etat au pouvoir législatif » dans un communiqué lu par leur représentant, Wilber López. Ils estiment que Daniel Ortega « méprise le vote des citoyens » qui les ont élus et porte un coup à « la démocratie, déjà affaiblie au Nicaragua, en fermant le dernier espace institutionnel de l’opposition ». Ils ont dénoncé cette décision qui va contre le principe d’indépendance et d’équilibre des pouvoirs de l’Etat, le pluralisme politique au Parlement, et qui confirme l’intention d’Ortega de vouloir instaurer un parti unique au Nicaragua. Ils ont ajouté qu’il était « particulièrement grave » que ceci survienne à trois mois des élections, comme « un objectif clair d’intimidation des citoyens opposés au régime sandiniste ». Ils ont également exhorté la communauté internationale à traiter de toute urgence la situation de la démocratie et de l’Etat de Droit au Nicaragua, et à prendre des mesures visant à la restauration d’élections libres et participatives et au retour immédiat des législateurs démis de leurs fonctions.
Daniel Ortega a donc annoncé le 28 juillet qu’il se présenterait en tandem avec sa femme à l’élection de novembre prochain. Il est grand favori et brigue donc un quatrième mandat. Poétesse excentrique connue pour ses penchants autoritaires, Rosario Murillo, que ses détracteurs surnomment la sorcière, est aussi réputée pour diriger dans l’ombre le gouvernement de gauche depuis l’élection de son mari en 2006. Elle va donc sortir de son rôle officieux pour celui de vice-présidente. L’annonce de la candidature à la vice-présidence de Rosario Murillo, épouse du chef de l’État et figure controversée de la politique nicaraguayenne, a renforcé les critiques des opposants à Daniel Ortega, qui l’accusent de vouloir imposer une dynastie familiale au pouvoir. La récente annonce de la candidature de Rosario Murillo inquiète dans le pays et déplaît même à certains des plus fidèles du clan Ortega. « Pour moi c’est la mort (du Front sandiniste) parce que j’ai déjà décidé que s’ils mettaient la Chayo (surnom de Mme Murillo) je n’irais pas voter », confie, sous couvert d’anonymat, un jeune membre du parti au pouvoir. Ainsi, Daniel Ortega poursuit-il le travail de sape qu’il a commencé une fois installé au pouvoir, en 2006, consistant à inféoder un à un les pouvoirs judiciaires et législatifs et à imposer une sorte de régime légal de parti unique.