Le secrétaire de l’Union des Nations Sud-Américaines (UNASUR), Ernesto Samper, a donné cette information, accompagné des médiateurs, – l’ex-chef du gouvernement espagnol José Luis Rodríguez Zapatero, l’ex-président Martín Torrijos (Panamá) et le Dominicain Leonel Fernández – après avoir rencontré le chef d’état vénézuélien au palais présidentiel de Miraflores, et une délégation de l’opposition à laquelle participaient, entre autres, les opposants Julio Borges, chef du groupe d’opposition au Parlement, et Luis Florido, président de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale. La présence du Vatican est une des conditions pour que l’opposition s’asseye à la table du gouvernement, bien qu’ils demandent aussi la fin des détentions “illégitimes”, le referendum révocatoire et la reconnaissance du Parlement, le gouvernement vénézuélien ayant envisagé fin juin de demander au Tribunal suprême de justice (TSJ) de dissoudre le Parlement, actuellement contrôlé par l’opposition.
Il faut rappeler la situation économique et politique du pays : ce pays, qui dispose des plus grandes réserves de pétrole du monde, subit de plein fouet la chute des cours du brut. Son économie s’est effondrée et le pays est en ébullition. Pillages et lynchages se font plus nombreux, et les habitants sont las d’une pénurie qui frappe 80 % des aliments, d’une criminalité en hausse et de la pire inflation au monde (180,9 % en 2015). Depuis des mois les antichavistes (du nom de l’ex-président Hugo Chavez, 1999-2013) cherchent par tous les moyens à destituer Nicolas Maduro, qu’ils rendent responsables des pénuries alimentaires et de la situation de plus en plus chaotique du pays. Réunis au sein de la coalition de la Table de l’unité démocratique (MUD), qui détient la majorité au Parlement, les opposants au chef de l’Etat exigent d’ici à fin 2016 un référendum révocatoire à son encontre.
Le Conseil national électoral (CNE) a donné son feu vert pour cette consultation populaire ce 1er août, après avoir différé sa décision pendant près d’un mois. L’opposition avait recueilli près de deux millions de signatures pro-référendum, dont seules 1,3 millions ont été validées par le CNE ; au moins 200 000 signataires devaient confirmer leur choix, en personne, fin juin. C’est sur ce point précis que le CNE a donné son feu vert. L’étape suivante consiste à recueillir 4 millions de signatures en faveur du référendum (soit 20% de l’électorat). Pour destituer Nicolas Maduro, le “oui” devra dépasser son score à la présidentielle de 2013 (7,5 millions de voix). Selon un sondage de l’institut Venebarometro, 64 % des Vénézuéliens (soit environ 12 millons) voteraient pour le départ du président. Le MUD veut à tout prix que le référendum ait lieu avant le 10 janvier 2017, car si Nicolas Maduro est révoqué avant cette date il y aura des élections anticipées. En revanche, si la consultation se déroule après et si le chef de l’Etat la perd, il pourra désigner son vice-président pour le remplacer. L’opposition a donc formellement demandé au CNE de fixer les dates de la dernière phase. Mais pour l’analyste Luis Vicente Leon, président du cabinet Datanalisis, le jeu potentiel du CNE ne serait pas d’éviter le référendum, mais de le retarder, et ce jeu n’est pas fini.
A noter que la situation au Venezuela entraîne une crise de gouvernance au Mercosur. Cette institution, qui regroupe l’Argentine, le Brésil, l’Uruguay, le Paraguay et le Venezuela n’a plus de président depuis le 1er août. L’Uruguay a mis fin à ses six mois de mandat et, conformément à l’ordre alphabétique, il revenait au Venezuela de prendre le relais, mais l’Argentine le Brésil et le Paraguay s’y opposent, en raison des violations réitérées des droits de l’homme dans ce pays. En référence notamment aux procès faits à des membres de l’opposition pour les faire taire, et donc à la violation de la liberté d’expression. En revanche, l’Uruguay soutient que l’ordre alphabétique devrait être respecté, et que le Venezuela devrait donc assumer la présidence tournante comme prévu. Il a également rejeté la proposition du gouvernement argentin selon laquelle l’Argentine pourrait assumer ces fonctions, celui-ci étant le prochain à devoir assumer la présidence après le Venezuela. Le vice-ministre paraguayen des Affaires étrangères Rigoberto Gauto a indiqué que les représentants des pays membres se réuniraient de nouveau dans les prochains jours afin de trouver une solution politique.
Catherine Traullé