Du 20 mai au 19 juin prochain, le Théâtre du Rond-Point à Paris présente Déshonorée la nouvelle pièce d’Alfredo Arias, célèbre figure de la scène argentine. Un spectacle sur les années de la dictature en Argentine, en écho à son 40e anniversaire, qui a donné lieu à de nombreuses manifestations en France.
Alfredo Arias est né à Buenos Aires. Il fait partie, dans les années soixante, d’un mouvement d’artistes plasticiens autour de l’Institut Di Tella, participant à de nombreuses expositions, happenings et performances. Puis, en 1968, il forme le Groupe TSE et quitte l’Argentine pour présenter ses spectacles à Caracas, New York et Paris.
Sa première création à Paris au Théâtre de l’Epée de Bois est Eva Perón de Copi. Alfredo Arias conservera toujours un lien avec l’écriture poétique et unique de son ami et montera La Femme assise ; Loretta Strong ; Les Escaliers du Sacré-Coeur ; Le Frigo et Cachafaz. Alfredo Arias compose un monde théâtral propre, avec une invention et un imaginaire baroque qui conserve toute la puissance de l’émerveillement de l’enfance, notamment Histoire du Théâtre ; Comédie policière ; Luxe ; Vingt-quatre heures ; Notes ; Vierge ; L’ Étoile du Nord. Découvrant le travail du dessinateur du 19e siècle Grandville, Alfredo Arias ouvre la porte d’un théâtre du merveilleux dans lequel règnent des animaux aux corps humains, et qui se prolonge dans un monde fantastique à l’instar de pièces comme Peines de cœur d’une chatte anglaise ; Peines de cœur d’une chatte française ; Le Jeu de l’amour et du hasard ; L’Oiseau bleu.
Avec Trio, pièce qui raconte la vie claustrée de ses tantes paternelles, Alfredo Arias commence un nouveau volet de son travail. C’est ainsi qu’il va explorer son enfance et plus tard ses retrouvailles avec son pays natal dans les spectacles Mortadela ; Faust Argentin ; Mambo Mistico et Famille d’artistes (musique originale d’Astor Piazzolla).
Son passage comme directeur du Centre dramatique national d’Aubervilliers lui permet de faire une halte dans son travail de création et de pouvoir ainsi visiter des textes fondamentaux par leur puissance dramatique : La Bête dans la jungle d’Henry James dans l’adaptation de Marguerite Duras, Les Jumeaux vénitiens ; La Locandiera, L’ Éventail de Carlo Goldoni, La Tempête de William Shakespeare (Festival d’Avignon), La Ronde d’Arthur Schnitzler (Comédie-Française), La Dame de chez Maxim’s de Georges Feydeau, Les Bonnes de Jean Genet (Athénée Théâtre Louis-Jouvet), Kavafis sur l’oeuvre du poète grec d’Alexandrie, Les Oiseaux d’Aristophane (Comédie-Française), Truismes d’après le roman de Marie Darrieussecq (Théâtre du Rond Point).
Alfredo Arias traduit également son univers dans celui de l’opéra, notamment dans La Veuve joyeuse au Théâtre du Châtelet ou Les Indes galantes et The Rake’s Progress au Festival d’Aix en Provence, Carmen à l’Opéra Bastille. Au Teatro Colon de Buenos Aires, il monte The Rake’s progress, Bomarzo et Mort à Venise. Toujours dans un esprit musical, il crée Concha Bonita sur une partition de Nicola Piovani, compositeur de Federico Fellini, entre autres pour Ginger et Fred. Puis il collabore avec Axel Krygier pour la création de trois pièces musicales Trois tangos ; avec Diego Vila pour le spectacle Tatouage et pour le Cabaret Brecht Tango Broadway, et avec Bruno Coulais qui lui écrit la partition d’El Tigre. Fuegos est son premier film, suivi du téléfilm Bella vista adapté de la nouvelle de Colette.
Déshonorée, la nouvelle pièce d’Alfredo Arias
“Même dans mon sommeil je suis maquillée. Impossible de me démasquer.” Figure mythique des scènes du Rond-Point, Alfredo Arias dirige ce face à face entre une star oubliée, proche d’Eva Perón, et une commission d’épuration de la Revolución libertadora. Un portrait de Buenos Aires, ses fantômes et ses cauchemars.
Fin des années cinquante, Fanny Navarro répond aux questions du Capitaine Gandhi. L’Argentine est en flammes et l’actrice interrogée. Star oubliée, proche d’Eva Perón, fantôme d’un art moribond, elle devient la cible des commissions d’épuration de la revolución libertadora. Ses liens privilégiés avec le régime déchu, sa liaison probable avec le frère d’Evita confondent la comédienne éprouvée, proie facile. Elle se défend, se débat, fait face aux accusations dans une pièce froide, dialogue drôle et glacé de l’Argentin Gonzálo Demaría. Le dramaturge, musicien et metteur en scène est né à Buenos Aires en 1970, un an avant la mort de la réelle Fanny Navarro dont il s’inspire.
Gonzalo Demaría a écrit en collaboration avec Alfredo Arias les spectacles Mambo Mistico et Trois tangos. Duel sombre et caustique, Déshonorée dresse un nouveau portrait de la cité argentine, hantée par les figures cauchemardesques de son passé et par ses stars de music-hall. Figure mythique, prolixe et prodige de la scène, Arias dirige et interprète ce face à face édifiant, règlement de comptes historique. Après la folie d’El Tigre, ou des cabarets tel Tatouage, donnés au Rond-Point, il livre avec cet interrogatoire emblématique un portrait de sa ville natale, mystérieuse et flamboyante, et de sa terrible histoire.” (Pierre Notte)
Théâtre du Rond-Point