Le nouveau film d’Ernesto Daranas, Chala, une enfance cubaine, sort ce mercredi en salles. L’occasion pour lui d’évoquer son pays natal à travers l’histoire d’un enfant des rues et de son institutrice.
Chala, jeune cubain, malin et débrouillard, est livré à lui-même. Elevé par une mère défaillante qui lui témoigne peu d’amour, il prend soin d’elle et assume le foyer. Il rapporte de l’argent en élevant des chiens de combat. Ce serait un voyou des rues sans la protection de Carmela, son institutrice, et ses sentiments naissants pour sa camarade Yeni…
Avec Chala, une enfance cubaine ce deuxième film d’Ernesto Daranas, (après Los dioses rotos en 2009, qui traite de la prostitution et du proxénétisme), le cinéma cubain nous présente un film remarquablement maitrisé, avec une finesse dans le traitement d’une situation qui a souvent sombré dans l’à peu près et la caricature. Bref, vous comprendrez pourquoi Chala a remporté le Prix du public aux 31e Reflets du cinéma Ibérique et Latino-américain de Lyon-Villeurbanne l’an passé.
Voici comment Laurent Hugues, le directeur du festival présentait le film dans Salsa Picante, le journal du festival :“ Chala, ce jeune garçon devenu adulte trop vite (en devant subvenir aux besoins du foyer, pour compenser une mère peu aimante, inconséquente et toxicomane), est pris en tenaille entre les dangers de la rue et les bienfaits de son école où Carmela, bienveillante enseignante, continue à se battre pour le sensibiliser – lui et les autres enfants victimes des mêmes réalités – à la culture, au savoir et à la connaissance de ses origines.
Face à l’incertitude et aux tentations de la rue (où l’on peut gagner de l’argent facile grâce aux combats de chiens, par exemple), Carmela, dans sa grande sagesse nourrie de son grand âge, leur offre des racines, des origines. Mais, un jour, terrassée par un malaise cardiaque, Carmela est forcée de prendre quelques semaines de repos, période durant laquelle Chala, toujours fort en gueule et en actes, se voit envoyé en foyer de rééducation par une flopée de jeunes et belles personnes, immanquablement représentatives, aux yeux du réalisateur, d’une Cuba nouvelle, certes entreprenante mais qui traiterait les problème à l’emporte-pièce, à l’image de la jeune remplaçante de Carmela, Marta.
D’ailleurs, le face à face entre Carmela et Marta ne manquera pas de faire s’affronter deux visages de Cuba, mais de manière subtile et loin d’un manichéisme qui aurait pu faire grand mal au film : Cuba l’ancienne, parfois aveuglée par sa foi en ses valeurs mais qui garde espoir en l’humain ; Cuba la moderne, contemporaine mais oublieuse de ses enfants et de leur héritage, déshumanisée, qui mettrait de côté les canards boiteux – fussent-ils légèrement claudiquant à cause de simples histoires de paperasses pas totalement “ règlementaires” – quitte à se séparer d’éléments brillants mais n’entrant plus dans le moule administratif. Une opposition qui tendra vers une compréhension, puis une convergence, ouvrant alors vers l’espoir d’une transmission des valeurs et, de là, de l’espoir.
Bien qu’Ernesto Daranas nous montre, toujours et sans concession, une réalité crue et dure, terreau sur lequel se basent les derniers films cubains, il met toutefois l’amour au cœur du récit, ce qui serait presque une nouveauté. L’amour que Chala éprouve pour sa mère (sans réciprocité possible) ou pour Yeni (qui représente pour lui un avenir possible), l’amour que Carmela éprouve pour “ses” enfants (à qui elle apprend finalement à aimer leur Histoire), mais l’amour que le réalisateur ressent aussi pour son pays, pour ses compatriotes, quels qu’ils soient, d’où qu’ils viennent.
Ainsi, Conducta (devenu Chala en France) est sans doute l’un des films cubains les plus patriotiques qui soient, sans que n’entrent en ligne de compte les préoccupations politiques, sociales ou dogmatiques. Il est relativement rare de voir la situation cubaine traitée avec autant de finesse, de maîtrise, d’objectivité et de qualité cinématographique, et c’est pourquoi nous parions que ce film fera date. Auréolé de récompenses un peu partout dans le monde, Ernesto Daranas s’affirme avec Chala comme l’un des cinéastes cubains contemporains majeurs, car la grande qualité du film ne peut être imputée à un coup de chance. Il faut également noter la très haute tenue de l’interprétation des comédiens, du jeune Armando Valdés Freire (dans le rôle de Chala) à Alina Rodríguez (qui joue Carmela), qui donne une crédibilité encore supérieure au film. Laissez-vous donc porter par les ailes du désir cubain d’Ernesto Daranas, comme les pigeons qu’élève Chala portent ses espoirs dans le ciel de La Havane.” Le film est recommandé pour le jeune public et il est possible de télécharger le dossier pédagogique sur le site du distributeur.
C’est aussi un film cubain El acompañante de Pavel Giroud qui a obtenu le Prix du public au Festival Cinelatino de Toulouse qui vient de se terminer. Il traite des personnes susceptibles d’avoir le Sida, mises en “sanatorium” en 1988, sous la surveillance de l’armée.
Alain LIATARD
Bande-annonce du film.
Cinélatino à Toulouse : le palmarès
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Il y a seulement quelques jours s’achevait le festival de cinéma latino-américain de Toulouse, Cinélatino. L’heure est donc venue de découvrir le palmarès de cette 28e édition.
Pour commencer, le Grand Prix Coup de Coeur a été décerné à Siembra, d’Ángela Osorio et Santiago Lozano. L’histoire d’un père et de son fils, face au déracinement. Le charisme et l’étrange élégance de Turco font de ce film un parfait mélange entre la fiction et la réalité socioculturelle des déplacés afro-colombiens.
La mention spéciale de ce prix est attribuée à Días extraños, de Juan Sebastián Quebrada. Un film sublime sur le couple qui se lie et se délie à Buenos Aires : Luna et Juan, un couple de jeunes Colombiens, vivent une relation passionnée, nourrie à la fois d’une intense complicité et d’explosions subites de rage, que la caméra suit au fil de soirées festives. Dans la catégorie du documentaire, El legado de Roberto Anjari-Rossi a remporté tous les suffrages. Un portrait sensible sur une jeune fille et sa grand-mère qui l’a élevée.
Le court-métrage Polski de Rubén Rojas Cuauhtémoc a également eu beaucoup de succès puisqu’il a remporté deux prix : le Prix Signis du Court-métrage et le Prix Révélation. Un petit film de 22 minutes sur l’histoire de Yoemil, jeune cubain de 20 ans qui hérite de la vieille “Polski” de son père. Pour retrouver le palmarès du festival dans son intégralité, rendez-vous sur le site de Cinélatino.
D’après le service de
presse de Cinélatino
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Décès du réalisateur chilien Ricardo Larrain
C’est le Ministère chilien de l’Éducation qui l’a annoncé ce mardi : le réalisateur chilien Ricardo Larrain est décédé lundi, à l’âge de 58 ans, des suites d’un cancer contre lequel il se battait depuis déjà plusieurs années. Ricardo Larrain est notamment connu pour son film La frontière (1991) récompensé par l’Ours d’argent au festival de Berlin et un Goya, équivalent des Césars en Espagne.
Voie aussi site France Info