Les sorties de la semaine: “Manos sucias” et “Casa grande”

Ce mercredi 3 juin sortent sur les écrans deux films très différents. Manos sucias de Josef Wladyka, né aux États-Unis, parle de la Colombie à travers un thriller. Quant à Casa grande, de Felipe Barbosa, c’est un film brésilien sur une famille bourgeoise.

 Manos sucias, de Josef Wladyka
Depuis le port de Buenaventura, ville la plus dangereuse de Colombie, trois hommes embarquent pour un voyage sur les eaux sombres du Pacifique.  Ils transportent une torpille contenant 100 kilos de cocaïne. Avec un filet de pêche pour seule couverture. Grâce à ce voyage à haut risque, ils espèrent gagner beaucoup d’argent, beaucoup plus qu’ils n’auraient imaginé. Leur joie est de courte durée. Entre les trafiquants qui menacent leur famille et la police qui les poursuit, commence alors une course effrénée pour leur survie. Encore un film sur la drogue en Colombie, ses trafics, les passeurs et la violence. Il n’en est rien car le film parle surtout de fraternité, de la perte de l’innocence car il y a un prix à payer car ils ont les mains sales. De plus le réalisateur n’est pas Colombien. Il est né aux États-Unis, en Virginie en 1981 de père polonais et de mère japonaise, tous deux passionnés par les arts. Il a étudié le cinéma à l’Université de New York. Après des courts-métrages et des publicités, il a obtenu une bourse du cinéaste Spike Lee pour réaliser ce film.

“Manos sucias, raconte le réalisateur, n’est pas l’un de ces films qui cherchent à rendre glamour la cocaïne et le trafic de drogue. On ne voit même pas de drogue dans le film. C’est au contraire un film qui met en lumière certaines réalités sur l’exploitation des enfants, l’appauvrissement des pêcheurs et les familles qui n’ont pas d’autre choix que de prendre part à cet univers. Nous avons écrit Manos Sucias pour captiver les spectateurs avec de l’action et du suspense, tout en leur donnant un aperçu des problèmes méconnus qui ravagent les habitants de cette région.”

Les comédiens sont pour la plupart des étudiants en art dramatique à l’université de Buenaventura, mais ils n’avaient jamais tourné dans un film et certaines scènes sont directement issues de leur vie. Le film est extrêmement bien rythmé et bien filmé, ce qui permet au spectateur d’être constamment accroché par cette aventure, mais il reste aussi sensible à la complicité de ces deux frères.

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Casa grande, film brésilien de Fellipe Barbos

Enfant de l’élite bourgeoise de Rio de Janeiro, Jean, prononcez à la française, car sa mère adore la France, a 17 ans. Tandis que ses parents luttent pour cacher leurs difficultés financières, il prend peu à peu conscience des contradictions qui rongent sa ville et sa famille. Tourné dans la propre maison de ses parents, le réalisateur Fellipe Barbosa dont c’est le premier long métrage, raconte un peu sa propre histoire : “En 2003, j’étais étudiant à l’Université Columbia de New York, quand mon père fut soudainement ruiné. Il nous le cacha aussi longtemps que possible. Le fait de ne pas avoir été là, avec ma famille, dans cette épreuve, m’a fait beaucoup réfléchir. Casa grande est une manière de pallier cette absence en m’imaginant avec eux, à 17 ans, alors que j’allais passer mes examens et choisir ma future carrière. Ce film est une projection de ce qui se serait passé si j’avais été là à cette période. (…) La perception de Jean est évidemment liée à ma propre expérience d’adolescent dans les années 90, notamment pour sa relation avec le personnel de maison. Ils étaient mes confidents, et je me sentais libre de leur parler de choses que j’étais incapable d’aborder avec mes parents. Pourtant malgré cette intimité, j’ai réalisé qu’en fait je ne savais rien d’eux et de la façon dont ils vivaient… Jusqu’à ce que j’aille chez eux, dans les favelas. Ma propre ignorance est devenue une inspiration. (…) Je crois que ce film n’aurait pu se passer ailleurs qu’à Rio, car c’est une ville très révélatrice des fractures sociales, où il y a une proximité unique entre les différentes classes, les différentes origines ethniques, qui entraîne une confusion que l’on ne peut voir qu’au Brésil.”

On pense évidemment aux nombreux films sur les grandes maisons bourgeoises et sur sa jeunesse mis en évidence dans les Reflets de Villeurbanne et de Cinelatino de Toulouse comme La niña santa de Lucrecia Martel, La Nana de Sebastián Silva, ainsi que par Les bruits de Recife de Kleber Mendonça Filho, avec qui il a travaillé. Il ne renie pas non plus l’influence française de Louis Malle, Maurice Pialat ou François Truffaut.
 Situant son film il y a quelques années, le film aborde le problème de l’accès aux universités où la plupart des étudiants étaient blancs. Des quotas ont été mis en place par Lula. Le film sélectionné dans de nombreux festivals dont Cinelatino où il remporta deux prix, a beaucoup de charme, de subtilité et de justesse. Le 17 juin, sortira d’ailleurs un autre film brésilien sur le sujet, mais différent, La seconde mère.

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 Alain LIATARD