Dans son premier livre, Manèges, écrit en français et publié en 2007, Laura Alcoba revenait sur ses souvenirs de la petite enfance, dans les années 70, à l’époque où ses parents, militants montoneros, tentaient d’échapper aux représailles du gouvernement argentin. Son père était déjà en prison et sa mère se cachait avec elle, avant d’être dénoncée et de devoir se réfugier en France.
Le bleu des abeilles, qui est en lice pour les Prix Médicis et Fémina 2013, raconte l’arrivée de Laura à Paris et sa découverte d’un nouvel univers. La fillette a du mal à reconnaître dans la banlieue où sa mère s’est installée le Paris de ses livres de français, du mal aussi à mettre en pratique le français qu’on lui a appris à Buenos Aires. Mais elle a dix ans et à cet âge-là, l’adaptation se fait malgré tout, et plutôt facilement, même si son accent est la source de bien des complexes.
Elle ne perd pas le lien avec l’Argentine, les lettres hebdomadaires qu’elle partage avec son père toujours emprisonné lui permettent de rester en contact, un contact paradoxalement très profond, semble-t-il.
Laura Alcoba parvient parfaitement à faire partager les doutes de la fillette, sa volonté de fer sous une apparence de douceur, ses découvertes aussi : il n’y a aucun jugement de sa part ou de celle de l’auteure. Son style, comme dans ses livres précédents, est d’une grande pureté, ce qui fait du lecteur un être proche, capable de partager ses émotions, tout cela sans le moindre artifice. En littérature la simplicité n’est pas la chose la plus facile à réussir, c’est peut-être la qualité principale de ce court « roman ».
Christian ROINAT
Laura Alcoba : Le bleu des abeilles, Gallimard, 121 p., 15,90 €.