Le président sortant Daniel Noboa a été déclaré vainqueur du second tour de la présidentielle dimanche en Équateur par l’autorité électorale. Sa rivale de gauche Luisa González ne « reconnaît pas » les résultats et réclame un recomptage des voix.
Selon les résultats partiels portant sur 94 % des bulletins, Daniel Noboa devance largement Mme González, avec 56 % des voix contre 44 %. Cette tendance « irréversible« , selon le Conseil national électoral (CNE), s’est rapidement dessinée lors du dépouillement. Daniel Noboa, 37 ans, s’est réjoui devant la presse d’une « victoire historique« , trouvant toutefois « regrettable qu’avec une différence de 11, 12 points, on essaie d’une manière ou d’une autre de remettre en question la volonté des Equatoriens« . Sa rivale a dit plus tôt depuis Quito ne pas reconnaître les résultats. « Je refuse de croire qu’il existe un peuple qui préfère le mensonge à la vérité (…) nous allons demander un nouveau décompte et l’ouverture des urnes« , a déclaré la dauphine de l’ancien dirigeant socialiste Rafael Correa (2007-2017), figure clivante en Équateur, en dénonçant une « fraude électorale grotesque« . Luisa Gonzalez, avocate de 47 ans, aspirait à devenir la première femme à diriger le pays. Elle avait déjà perdu en octobre 2023 face à Daniel Noboa, alors surprise du scrutin convoqué par son prédécesseur Guillermo Lasso.
Anti-corréisme tenace
Au premier tour, après des résultats serrés, c’était Daniel Noboa qui avait alors dénoncé de « nombreuses irrégularités« , des soupçons rejetés par les observateurs internationaux présents sur place. Luisa Gonzalez avait pour sa part accusé le gouvernement « d’actions désespérées » visant à manipuler les procès-verbaux de l’élection. La présidente du CNE, Diana Atamaint, avait prévenu dimanche matin : « Nous devons rejeter fermement le discours sur la fraude, les accusations sans preuve (…) minent la confiance envers la démocratie« . En vain. De nombreux observateurs s’attendaient à un combat vote par vote au second tour. Les résultats sont donc « très surprenants« , selon Pedro Labayen Herrera, spécialiste de l’Équateur au sein du Centre pour la recherche économique et politique (CEPR). Ils traduisent le fait que « dans la société équatorienne, persiste encore un énorme sentiment anti-corréiste, dont on n’avait pas imaginé l’ampleur ni l’importance« , estime le chercheur.
Campagne sous tensions
Selon le CNE, 84 % des 13,7 millions d’électeurs appelés aux urnes dans ce scrutin obligatoire se sont rendus dans les bureaux de vote gardés par des milliers de militaires et policiers. Dans la capitale, l’ambiance était festive après l’annonce des résultats. « Nous serons mieux équipés pour affronter (…) la mafia et absolument tout ce qui est mauvais dans le pays« , estime Natalie Ulloa, administratrice de 26 ans, devant le siège du parti au pouvoir à Quito. Ces dernières années, le pays andin de 18 millions d’habitants a connu une transformation brutale. Ses ports sur le Pacifique, son économie dollarisée et sa position entre Colombie et Pérou, les deux plus gros producteurs mondiaux de cocaïne, ont fait de l’Équateur une plaque tournante du trafic de drogue. La guerre entre cartels a conduit à l’assassinat d’un candidat à la présidence en 2023, à la prise de contrôle de prisons par des groupes criminels et à une attaque armée début 2024 contre une chaîne de télévision. Tout cela dans une économie endettée et chancelante. Autrefois considéré comme une oasis de tranquillité dans une région troublée, l’Équateur a connu en 2025 le début d’année le plus sanglant de son histoire récente: chaque heure, une personne est tuée. « Dans le pays, il y a beaucoup de délinquance, de meurtres. On a l’espoir que la victoire (de Noboa) permette de changer » les choses, témoigne Virginia Figueroa, une septuagénaire vivant à Olon.
Deux visions
Le scrutin de dimanche proposait deux projets bien distincts. Héritier d’un magnat de la banane, Daniel Noboa incarne l’élite politique équatorienne issue du monde de l’entreprise. Il exploite sur les réseaux sociaux son image de jeune dirigeant tenant d’une ligne dure en matière de sécurité, marquée par l’envoi de militaires dans les rues et dans les prisons, une politique dénoncée par des organisations de défense des droits humains.
Luisa Gonzalez vantait des dépenses accrues dans les infrastructures et services publics dans un pays en récession, frappé par la pauvreté et le travail précaire. L’avocate, qui s’affiche comme une femme simple, mère célibataire qui s’est faite toute seule, promettait également la sécurité mais avec un plus grand respect des droits humains.
Ces dernières années, le pays andin de dix huit millions d’habitants a connu une transformation brutale. Ses ports sur le Pacifique, son économie dollarisée et sa position entre Colombie et Pérou, les deux plus gros producteurs mondiaux de cocaïne, ont fait de l’Équateur une plaque tournante du trafic de drogue. Autrefois considéré comme une oasis de tranquillité dans une région troublée, l’Équateur a connu en 2025 ses cinquante premiers jours les plus sanglants de son histoire récente, avec l’équivalent d’une personne tuée par heure.
D’après Dépêches Latinos