Un vieil homme sage entreprend son dernier voyage dans la jungle colombienne pour y trouver un endroit où mourir. Mais les groupes armés illégaux qui contrôlent la région mettent en péril sa transition vers le royaume des morts.
José de Los Santos (70 ans) vit dans un village de la côte pacifique colombienne. Enfant, il a appris les arts des rituels mortuaires hérités de ses ancêtres africains, anciens esclaves. Un jour, l’âme de son fils Pium-Pium —violemment assassiné— lui annonce sa mort, l’avertissant qu’il ne doit pas mourir près de sa maison, et surtout, qu’il doit mourir en paix. José de los Santos entreprend un voyage à travers la jungle pour trouver un endroit où mourir, défiant le couvre-feu imposé par les groupes armés illégaux qui se disputent le territoire. Il doit survivre aux armes pour ne pas rejoindre les âmes du purgatoire.
« Cet homme, explique le réalisateur, transite en permanence entre le monde des vivants et celui des morts, car c’est un décor où tout devient possible. Ainsi se crée un terrain très fertile pour explorer une autre manière d’aborder l’histoire, en croisant ces mondes possibles. Ces mondes, qui sont aussi des mondes historiques, se trouvent emprisonnés dans la jungle et se dévoilent peu à peu au fil du film. Il y a un dialogue constant entre la nature et l’humanité de José. C’est un homme qui se fond dans la jungle, dans la lumière du soleil et l’ombre, faisant partie de l’atmosphère, présent et absent à la fois, selon sa volonté. José est le dépositaire d’une essence qui traverse les générations, une vieille âme en transit. Il s’agit donc du portrait d’un personnage doté d’un don particulier, d’un savoir hérité de ses ancêtres qui le protège, d’un chant de lamentation qui est aussi un cri de résistance, mais qui, en même temps, l’enferme. Il est pris dans les échos de l’esclavage et la peur omniprésente provoquée par les acteurs armés qui se disputent le contrôle des terres dans la région. J’ai vu trois lumières noires naît d’un besoin de rencontre avec l’une des régions les plus exploitées et abusées de la Colombie. José de Los Santos est un personnage qui, dans son corps, incarne ce lieu d’exploitation et d’abus, et dans sa voix, représente les pleurs et la résistance de la terre.»
Nous suivons José à la fois guérisseur reconnu et voulant enterrer les morts jetés dans la rivière par les paramilitaires. Mais il est aussi en contact avec les morts.Mais ses jours sont comptés. Le film est à la fois réaliste et onirique comme l’explique bien le réalisateur. C’est un film prenant sur la Colombie, un film qui aborde la menace que représente le conflit armé pour les rituels funéraires, également synonymes de résistance et de liberté. Il a été primé dans de nombreux festivals. Il mérite vraiment qu’on le découvre à partir du 19 mars.
Alain LIATARD
En salle le 19 mars 2025 / 1 h 27 min. De Santiago Lozano álvarez. Avec Carol Hurtado, Jesús María MIna, Julián Ramirez. Titre original : Yo vi luces negras. Nationalités Colombie, Mexique, France, Allemagne.