Le Brésil renforce la surveillance satellite pour combattre la déforestation en Amazonie

Le Gouvernement brésilien a affiné l’année dernière la précision de la surveillance satellite, indispensable pour combattre la déforestation en Amazonie, bien que les scientifiques chargés du programme affirment encore avoir besoin de plus du double des moyens de ce qu’ils disposent pour pouvoir affronter ce défi. La déforestation, principale source d’émissions polluantes au Brésil, a chuté de 31 % entre août 2023 et juillet de cette année dans la plus grande forêt tropicale du monde et a affecté une superficie de six mille 288 kilomètres carrés, la plus petite zone en neuf ans, d’après des chiffres officiels publiés ce mois.

Le président Luiz Inácio Lula da Silva a célébré le chiffre comme preuve qu’il prend au sérieux l’environnement à la différence de son prédécesseur, d’ultradroite Jair Bolsonaro (2019-2022), très détaché à ce sujet. Cette réussite est le résultat d’une chaîne d’actions qui commence à des centaines de kilomètres de la superficie terrestre, où plusieurs satellites captent des images qui après sont analysées à l’Institut National de Recherches Spatiales, dépendant du ministère des Sciences. « Quand j’ai commencé c’étaient des images sur papier et tout était très lent, maintenant on arrive à détecter des terrains d’un hectare. » explique le coordinateur du programme, l’agronome Cláudio de Almeida, qui fait partie de l’institution depuis deux décennies.

Cette année, l’Institut de Recherches Spatiales a travaillé pour la première fois entièrement avec des satellites Sentinel, qui produisent des images avec une résolution trois fois supérieur à celles du Landsat de la NASA qu’ils utilisaient avant. Un autre bénéfice est que ces satellites leur fournissent des images tous les cinq jours, alors qu’avec Landsat les chercheurs brésiliens devaient attendre 16 jours pour recevoir une nouvelle image. « Nous voyons avec plus de clarté les bords du terrain et nous avons plus d’images parce que les satellites passent plus de fois. » explique Almeida.

Grâce à cette technologie radar, ces appareils permettent aussi de vaincre un des défis majeurs de la surveillance satellite en Amazonie : les nuages. Jusqu’à présent, entre 5 et 6% de la cartographie était incomplète parce qu’elle était toujours couverte de nuages, ce qui obligeait les chercheurs à estimer la déforestation en fonction d’autres terrains limitrophes à ciel dégagé. Chaque jour, l’Institut National de Recherches Spatiales envoie des centaines d’images de zones déforestées au ministère de l’Environnement pour que celui-ci envoie des inspecteurs de terrain.  » Il n’y a pas d’inspecteur de terrain disponible pour chaque polygone de terrain* que nous envoyons, parce qu’ils doivent prioriser,  » admet-il.

Si le nom du propriétaire du terrain déforesté est identifié, le Ministère peut émettre des résolutions de charge et de sanction, lesquelles ont presque doublées l’année dernière, même si l’impunité est haute et que l’immense majorité des hors-la-loi ne payent pas l’amende. « Quand ils sont identifiés, ils vont aux tribunaux et retardent la demande jusqu’à expiration. L’impunité est une motivation pour commettre des crimes environnementaux. » pointe la porte-parole de Greenpeace Cristiane Mazzetti. L’Institut National de Recherches Spatiales est passé par des moments difficiles avec Bolsonaro, qui les accusait de mentir et de faire une campagne contre le Brésil. Son directeur de l’époque, Ricardo Galvão, a été viré après avoir critiqué le président pour avoir remis en question la solidité des données, qui montraient une forte augmentation de la déforestation.

Au milieu de doutes au sujet du futur de l’institution, Greenpeace a lancé son propre outil satellitaire pour capter la déforestation.  » Il n’était pas clair si la surveillance officielle allait continuer et on voulait avoir quelque chose pour continuer à le faire, pour compléter. » signal Mazzetti. Même si Lula ne questionne pas les données de l’Institut National de Recherches Spatiales, le budget du programme de surveillance, environs huit millions de réaux* (autour d’1,3 million de dollar), est toujours inférieur à la moitié de ce dont l’équipe a besoin, selon Almeida. En plus de recevoir plus de ressources, l’objectif du chercheur est d’augmenter la fréquence de capture d’image pour pouvoir réagir plus rapidement. D’un point de vue professionnel, ce qui m’intéresse ce n’est pas l’augmentation ou la chute de la déforestation, mais de garantir la qualité, que mes données passent de 94% à 98% de précision, assure-t-il, même s’il ne cache pas non plus sa satisfaction de voir la déforestation.