Antonio Skármeta est décédé ce 15 octobre à 84 ans. Il était surtout connu en Europe pour son roman Ardiente paciencia (Une ardente patience, éd. du Seuil) porté deux fois au cinéma (Ardiente paciencia, 1983, mis en scène par Antonio Skármeta lui-même et Il Postino (Le facteur), 1994, mis en scène par Michael Radford, avec Philippe Noiret dans le rôle de Pablo Neruda).
Photo : Université du Chili
Il était aussi l’auteur d’une dizaine de romans, de nouvelles, de livres pour la jeunesse et de cinq pièces de théâtre. Il avait reçu une foule de prix et de décorations dans plusieurs pays, en Amérique et en Europe. Il avait également enseigné dans des universités chiliennes et nord-américaines et avait un temps été ambassadeur du Chili. Ses engagements politiques l’avaient éloigné du Chili pendant la période Pinochet, il s’était réinstallé à Santiago en 1989. Il était membre de l’Académie chilienne.
Son œuvre, très populaire comme le personnage, reflétait la variété de ses goûts, sa curiosité et sa soif de découvrir et simplement de vivre. En France on peut lire ou relire outre Une ardente patience (qui a gardé son titre original contrairement au film qui en a été tiré, Le facteur, éd. Points), Les jours de l’arc en ciel, qui a, lui, inspiré le film No (2012, mis en scène par Pablo Larraín, avec Gael García Bernal, éd. Points), La rédaction (éd. Belin), T’es pas mort (éd. Points), Beaux enfants, vous perdez la plus belle rose (éd. Gallimard).
Un mot plus personnel, à Santiago il y a neuf ans, un déjeuner dans un restaurant choisi par Antonio a été un moment intense de discussion, de très bon vin (aussi choisi par lui bien sûr) et de beaucoup d’éclats de rire. Avec lui, on ne s’ennuyait jamais !
Christian ROINAT
Antonio Skármeta et Espaces Latinos
Dès notre retour au Chili, au moment des premières années après le départ du général Pinochet, nous avons pris contact avec Antonio car nous avons milité durant l’Unité populaire de Salvador Allende, dans le même parti politique. Il nous a reçu chez lui pour partager nos impressions sur le Chili à reconstruire et surtout renforcer la création culturelle. En 2008, nous l’avons invité à Lyon à nos Belles Latinas et plus tard à plusieurs reprises nous nous sommes rencontrés au Chili et en France.
Antonio Skármeta, né à Antofagasta, Chili, en 1940, est un auteur traduit dans plus de vingt langues et son œuvre comprend des romans tels que Les Noces du poète, La Fille au trombone et La Danse de la Victoire, qui lui ont valu d’importantes récompenses. Le film NO (2012), de Pablo Larraín, s’inspire également de sa pièce El plebiscito. Intellectuel de gauche, il a été membre du Mouvement d’action populaire unitaire (MAPU) dans les années de l’Unité populaire. Après le coup d’État militaire d’Augusto Pinochet, l’écrivain quitte le pays avec le cinéaste Raúl Ruiz. Après avoir vécu un an en Argentine, le destin le pousse en Allemagne, où il écrit son premier roman J’ai rêvé que la neige brûlait.
À partir de 1979, il travaille comme professeur de scénarisation cinématographique à l’Académie allemande du cinéma et de la télévision de Berlin-Ouest. Skármeta retourne au Chili en 1990 où il rejoint l’Institut Goethe de Santiago. Outre le Prix Planeta pour La Danse de la Victoire, l’écrivain a été honoré du titre de Chevalier des Arts et des Lettres, décerné par le ministère français de la Culture, ainsi que d’une bourse de la Fondation Guggenheim et des Arts de Berlin.
Januario ESPINOSA