Espaces Latinos a bien suivi les 25 ans du festival du cinéma brésilien en 2023 ! Cette édition, particulièrement exceptionnelle, vous avait invités à redécouvrir les grandes voix de la musique populaire brésilienne. C’est avec une infinie joie que nous revenons pour la 26e édition du festival, qui se déroule au Cinéma l’Arlequin du 26 mars au 2 avril.
Photo : Jangada
Qu’il s’agisse d’évoquer le mandat du dirigeant d’extrême droite Jair Bolsonaro, marqué jusqu’aux derniers jours par l’infamie d’un pouvoir allant jusqu’à la tentative d’un coup d’État en janvier 2023, ou la diversité ethnique et sociale du Brésil, ce pays multifacettes grand comme seize fois la France, le cinéma brésilien n’est jamais en peine de créativité. Dans l’édition 2024 du festival de cinéma brésilien qui se déroule ces jours-ci jusqu’au 2 avril à Paris, on croise des films et des documentaires qui nous parlent de ces jeunes homosexuels “soignés“ contre leur gré par les églises évangéliques, du tabou de l’avortement, considéré légalement comme un crime, des peuples autochtones et de ces Afro-Brésiliens toujours marginalisés, mais aussi du funk carioca et d’amour, bien sûr.
De l’amour comme celui d’une romance sur fond de misère sociale, tournée en 1978, Dans la bouche du monde, où l’acteur brésilien iconique Antônio Pitanga, prend la caméra pour illustrer la réalité du petit peuple brésilien. À Paris, Antônio Pitanga, 84 ans, est précisément l’invité d’honneur de cette édition 2024, lui qui incarne, explique Sandro Viana, le producteur du Festival, “un cinéma très engagé et audacieux en temps de dictature“, aux côtés de son ami Glauber Rocha, figure disparue du cinéma Novo (Nouvelle Vague) des années 1960 et 1970 au Brésil. “Ces deux personnalités ont eu une conception très politique de ce que le cinéma doit apporter au public“, poursuit Sandro Viana. “Leur rencontre puis leur amitié a non seulement façonné les films de cette époque, mais leur personnalité même ». De fait, Antônio Pitanga dit volontiers que “le cinéma [lui] a donné [sa] citoyenneté“, lui qui en tant que Brésilien noir n’aurait sans doute jamais été autant respecté et aimé s’il n’avait été reconnu par ses rôles et son talent de réalisateur.
Une rétrospective de six films d’Antonio Pitanga est donc proposée par le Festival, qui présente également un extrait du prochain film de l’infatigable acteur et réalisateur et un documentaire sur lui, réalisé par sa fille Camila Pitanga, également actrice. C’est une programmation riche de 31 films, dont beaucoup de nouvelles productions, qui signe ce Festival 2024 majoritairement autofinancé par l’association qui le porte, Jangada, et sa fondatrice Katia Adler. “Souvenons-nous que le Brésil n’a pas eu de Ministère de la Culture pendant quatre ans [de mandat de Jair Bolsonaro, 2018-2022]“ rappelle Sandro Viana. C’est tout le mérite d’une création cinématographique brésilienne que de triompher des difficultés en produisant des films remarqués par la critique et diffusés en France, comme Levante, sélectionné par la Critique au Festival de Cannes 2023. Un film où la force du collectif et la tendresse se (sou)lèvent contre les rigidités et les interdits d’une société conservatrice.
Sabine GRANDADAM
Au cinéma l’Arlequin à Paris jusqu’au 2 avril, programme sur le site https://www.jangada.org/festival-events-fr/festival-du-cinema-bresilien-de-paris-26