« Cuba. Chroniques d’un cauchemar sans fin » de Floréal Melgar aux éd. l’Esprit Frappeur

L’Esprit Frappeur est une maison d’édition française créée en 1997 et toujours en activité. Elle publie des essais politiques concernant des questions d’actualité, ainsi que quelques textes littéraires. Elle vient de publier ces chroniques cubaines de Floreal Melgar, fils d’un réfugie espagnol.

Photo : Esprit Frappeur et Chante Bou-Hanna

Ces dernières années, l’accès à internet, même limité, a permis à de nombreux Cubains de s’exprimer librement, sur des sites d’opposition au régime et plus récemment sur les réseaux sociaux. Dans un pays ou toute voix dissidente est étouffée depuis soixante ans, cette relative liberté a eu pour conséquence de voir s’accroître la répression envers ceux qui en usent, journalistes indépendants ou défenseurs des droits de l’homme dans leurs divers aspects. Depuis octobre 2019, l’auteur, longtemps militant libertaire, s’est attaché à rapporter, sur son blog personnel, des cas concrets de cette répression qui frappe, quasi quotidiennement, ces Cubains qui se battent contre la dictature, dans l’indifférence générale de nos médias.

Il faut savoir ce qu’est un gouvernement totalitaire pour comprendre jusqu’à quel point la vie quotidienne des Cubains est contrôlée et dépendante de l’État. Même les relations les plus intimes, familiales ou amicales, n’échappent pas à l’œil et au bras de l’État. Le monopole des moyens de communication permet de contrôler les pensées et âmes du peuple, pensées et âmes déjà malades, victimes d’un système éducatif totalement idéologisé. Si de plus en plus de Cubains prennent conscience de cette asphyxiante et injuste réalité, très peu trouvent encore le courage ou l’énergie de dénoncer et de s’opposer à un Léviathan aussi omniprésent.

Ceux qui le font sont réprimés par des moyens allant du harcèlement social le plus subtil à de longues peines de prison pour de faux délits de droit commun, car à Cuba les prisonniers politiques ne sont pas reconnus. L’impunité absolue de la répression d’État est due au fait qu’elle est appliquée à des hommes et des femmes sans nom, des Cubains anonymes sans accès à aucun moyen de communication et ignorés tant par la presse nationale complice que par les quelques correspondants étrangers condescendants, contrôlés et corrompus, que le gouvernement autorise sur l’île. Dans cette réalité inconsolable, il y a des gens qui, au prix de sacrifices personnels, se lèvent et, comme s’ils avaient en eux une lanterne morale, éclairent là où personne ne veut regarder pour ne pas s’impliquer, là où travaillent ces femmes et ces hommes, ces Cubains qui ont réussi à trouver de la force pour regarder le gouvernement en face et exiger des droits pour tous.

L’un de ces « éclaireurs » est mon ami Floréal Melgar, qui, dans une série d’articles publiés sur son blog personnel, « Le blog de Floréal », offre au public de langue française, en parfaites synthèses, des informations sur ces Cubains, mes compatriotes, chez qui réside la conscience d’une île qui est en train de se réveiller. On pourra penser qu’un homme et son seul blog est peu de chose, mais pour ceux qui n’ont rien et ne vivent que la constance de la répression et de l’isolement social, ce peu est beaucoup, ce peu est un début, ce peu est la première fissure qui finira par détruire le mur du silence que le pouvoir étatique a bâti autour des Cubains qui veulent le pain et la liberté.

Floréal est l’un des rares qui, sans relation directe avec Cuba et son peuple, s’emploie à connaître notre réalité, celle des personnes, et non la carte postale artificielle que présente le pouvoir. Floréal a été intéressé, dès le début de son approche de Cuba, par ce que le peuple endure ici, et il l’a fait sans préjugés et avec une grande humilité, pour ensuite, sans autre intérêt que l’utilité et sans autre motivation que l’indignation personnelle face à ce qu’il a découvert, se mettre à son côté et se battre. J’ai le plaisir de considérer Floréal Melgar comme un ami, mais, plus encore, j’ai l’honneur d’être l’un des premiers Cubains qu’il a connus et auprès de qui il s’est informé de notre réalité, qu’il a en quelque sorte fait sienne, et l’énorme mérite de son travail fait qu’en ce sens, égoïstement peut-être, je le ressens comme étant un peu le mien.

David ORRET CISNEROS
Ed. Esprit Frappeur

Cuba, chroniques d’un cauchemar sans fin par Floreal Melgar, préface de DavidOrret Cisneros aux éd. L’Esprit Frappeur, 263 p. 5 euros. En vente aux Librairies Publico (145, rue Amelot-Paris 11e) et Lady Long Solo (38, rue Keller-Paris 11e). Et disponible sur le site de la FNAC etc.