La stratégie adoptée par de nombreux pays des Amériques afin de combattre le COVID-19 s’appuie sur l’emploi de mesures répressives et un recours injustifié à la force. Ces tactiques, auxquelles s’ajoutent des difficultés d’ordre structurel et de vastes disparités sociales et économiques antérieures à la pandémie, contribuent à perpétuer l’inégalité et la discrimination sur le continent.
Photo : Le Temps
Les pays de la région des Amériques doivent privilégier une démarche respectueuse des droits humains dans le cadre de la lutte contre la pandémie de COVID-19, qui a mis en évidence de fortes inégalités et des discriminations dans cette région, a déclaré Amnesty International dans une lettre ouverte aux chefs d’États qui assisteront à l’Assemblée générale de l’Organisation des États américains (OEA).
« La stratégie adoptée par de nombreux pays des Amériques afin de combattre le COVID-19 s’appuie sur l’emploi de mesures répressives et un recours injustifié à la force. Ces tactiques, auxquelles s’ajoutent des difficultés d’ordre structurel et de vastes disparités sociales et économiques antérieures à la pandémie, contribuent à perpétuer l’inégalité et la discrimination sur le continent », a déclaré Erika Guevara Rosas, directrice pour les Amériques à Amnesty International.
Dans des pays comme le Salvador, le Paraguay et le Venezuela, entre autres, les mesures strictes introduites afin de combattre la pandémie de COVID-19 ont notamment mené au placement de dizaines de milliers de personnes dans des centres de confinement administrés par l’État, sous la responsabilité de la police ou de l’armée. L’imposition d’un confinement obligatoire sous le contrôle des autorités, sans que la durée de cette mesure ne soit connue, dans des environnements ne présentant pas les conditions minimums de prévention et de contrôle des infections, et sans la garantie de pouvoir bénéficier de procédures indépendantes conformes au droit international relatif aux droits humains, pourrait constituer une forme de détention arbitraire. Par ailleurs, si les centres de confinement favorisent des situations discriminatoires, et si les autorités ne proposent pas d’eau, de nourriture, ni de soins médicaux adéquats, ces conditions pourraient s’apparenter à des traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi qu’à une violation du droit à la santé.
En outre, dans des pays tels que le Chili et le Nicaragua, où des violations des droits humains, voire des crimes de droit international – comme par exemple des actes de torture -, ont été commis ces dernières années, il est indispensable que les États membres de l’OEA, en vertu de l’obligation commune de garantir les droits humains, réclament que les autorités nationales compétentes mènent des enquêtes sérieuses et exhaustives sur ces situations.
Dans le cas précis du Nicaragua, il est impératif d’agir afin de prévenir la propagation de la pandémie dans le pays, de remettre en liberté les personnes détenues uniquement pour avoir exercé leurs droits, et d’adopter des mesures visant à protéger les professionnel·le·s de la santé face aux actes d’intimidation qu’ils subissent lorsqu’ils expriment leur désaccord avec les politiques gouvernementales.
Il faut aussi que la coopération entre les États des Amériques garantisse que les soins médicaux contre le COVID-19, ainsi qu’un éventuel vaccin, soient disponibles et accessibles sans discrimination, par le biais de mesures spécifiques visant à soutenir les groupes à risque, ou ceux dont la marginalisation signifie qu’ils pourraient être désavantagés en matière d’accès aux vaccins ou aux soins.
« Les États des Amériques doivent veiller à éviter une approche exclusivement nationale dans leur politique de soins et la distribution des futurs vaccins contre le COVID-19. La coopération internationale doit empêcher que les accords bilatéraux ne l’emportent sur les besoins régionaux de la population du continent dans son ensemble. Voilà les critères à prendre en considération en matière de soins, dans un respect constant des normes relatives aux droits humains », a déclaré Erika Guevara Rosas.
Amnesty International estime également qu’il est crucial, en cette période historique, de renforcer le système interaméricain de défense des droits humains. L’organisation demande à cet effet aux États membres de l’OEA et à son secrétaire général de respecter l’autonomie et l’indépendance des organes du système interaméricain de défense des droits fondamentaux. L’organisation recommande en outre l’adoption de mécanismes d’enquête indépendants qui permettront d’effectuer un suivi adéquat des plaintes ayant pu être déposées au sein de la Commission interaméricaine des droits de l’homme, assurant ainsi le respect de l’ensemble des garanties pour les différentes parties, la transparence de la gestion publique, et éventuellement, si cela est indiqué, l’établissement des responsabilités et des mesures de réparation.
Les États des Amériques doivent veiller à éviter une approche exclusivement nationale dans leur politique de soins et la distribution des futurs vaccins contre le COVID-19. La coopération internationale doit empêcher que les accords bilatéraux ne l’emportent sur les besoins régionaux de la population du continent dans son ensemble. Voilà les critères à prendre en considération en matière de soins, dans un respect constant des normes relatives aux droits humains.
Amnesty International
Une délégation d’Amnesty International sera présente lors de la 50e Assemblée générale de l’OEA, le 21 octobre à Washington D.C., et des porte-parole seront disponibles pour des entretiens.