La semaine du 5 au 10 mars 2013

5 – COLOMBIE – LArmée de Libération Nationale (ELN), l’autre guérilla colombienne, a libéré les deux frères allemands Uwe et Günther Otto Breur, après quatre mois de détention, dans la région du Catatumbo, près de la frontière avec le Venezuela, dans la même zone où ils ont été enlevés. La mission humanitaire, à laquelle a pris part le Comité International de la croix rouge, a pu opérer grâce à la cessation d’opérations militaires après l’autorisation du président Juan Manuel Santos. L’ex avocat général Jaime Bernal Cuellar, membre de la Comisión Facilitadora para los Diálogos con el ELN, qui existe depuis 1999 et qui a négocié dans cette libération, a assuré aux médias colombiens que pendant la livraison des otages un des guérilléros de l’ELN lui a dit : « l’homme mérite la peine de dialoguer et la manifestation qui a été faite montre qu’il faut lutter pour finir cette guerre qui n’apporte aucun bénéfice au pays, ni à personne ». Quant à Jaime Bernal Cuellar, il avait dit être disposé à recevoir les otages mais aussi à faciliter un rapprochement entre les parties, en pensant un processus de paix.

5 – VENEZUELA – C’est le vice-président Nicolas Maduro qui a annoncé avec émotion la nouvelle de la mort du président Hugo Chávez à ses compatriotes, « la plus dure et la plus tragique que nous puissions annoncer au peuple ». À 58 ans, Hugo Chávez a succombé au cancer dont il souffrait depuis 2011, après quatorze ans de pouvoir et une longue agonie. Militaire de carrière converti au socialisme du XXIe siècle, le  Commandant-président avait remporté treize des quatorze scrutins depuis 1998. Il avait mis son exceptionnel charisme au service de la cause des plus démunis. Haut en couleur, souvent provocateur dans ses longs discours publics, le chantre du projet de la Révolution bolivarienne a été adulé et détesté bien au-delà des frontières de son pays. Il avait été réélu en octobre 2012 pour un nouveau mandat de six ans. Mais, en décembre, il avait annoncé  être victime d’une rechute de son cancer et avait été opéré une nouvelle fois le 11 décembre à Cuba. Rentré au pays le 18 février, le président restait hospitalisé et silencieux. Devant l’Hôpital militaire de Caracas où il est décédé, les caméras de télévision filment la tristesse des gens spontanément descendus dans la rue pour pleurer la disparition du président. « On s’y attendait mais on n’y croyait pas », résume une femme en larmes. Le gouvernement vénézuélien a annoncé sept jours de deuil national et suspendu les cours pendant trois jours. Les chefs d’État de la région ont immédiatement fait parvenir leurs condoléances aux Vénézuéliens. Le Cubain Raul Castro, l’Argentine Cristina Kirchner, le Bolivien Evo Morales et l’Équatorien Rafael Correa ont, eux aussi, annoncé plusieurs jours de deuil national. « Un révolutionnaire est parti, mais nous sommes encore des millions », a déclaré Rafael Correa, récemment réélu. Selon la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela, en espagnol República Bolivariana de Venezuela, nom officiel du Venezuela depuis la constitution de 1999, une élection présidentielle aura lieu dans 30 jours.

5 – ARGENTINE – Un procès historique s’ouvre à Buenos Aires pour juger 25 responsables de l’opération Condor, le réseau de collaboration entre les dictatures du cône sud de l’Amérique latine pour éliminer des opposants, dans les années 1970 et 1980. La chasse à l’homme a fait des milliers de disparus en Argentine, en Bolivie, au Brésil, au Chili, en Uruguay et au Paraguay. Des documents révélant l’existence du plan concerté entre les six dictatures du cône sud de l’Amérique latine avaient été découverts en 1992, dans un commissariat désaffecté d’Asunción, par l’avocat paraguayen Martin Almada, qui avait été lui-même arrêté et torturé pendant trois ans sous la dictature de Stroessner. Le juge chilien Juan Guzman – qui avait condamné Augusto Pinochet – et le magistrat espagnol Baltasar Garzón – qui avait demandé, en 1998, l’extradition du général Pinochet, détenu en Grande-Bretagne – ont désigné le dictateur chilien comme le principal cerveau de l’opération Condor ; un plan qui aurait été conçu lors d’une réunion des services secrets de la région, en 1973, sous la houlette du général Manuel Contreras, chef de la DINA, la police secrète de Pinochet. En Argentine, les hauts responsables de la dictature militaire ont longtemps bénéficié de lois d’amnistie, jusqu’à l’arrivée au pouvoir du président péroniste Néstor Kirchner (2003-2007), qui les a abrogées, permettant l’ouverture de centaines de procès et la mise en examen de plus d’un millier de militaires et de policiers. Ce procès, qui pourrait durer deux ans, avec les témoignages de quelque 450 personnes, est le premier focalisé sur l’opération Condor en Amérique latine. Il recueille des plaintes déposées entre 2008 et 2012 par 106 victimes, une majorité d’Uruguayens, des Argentins, mais également des Paraguayens et des Chiliens arrêtés et torturés en Argentine.

8 – VENEZUELALes 32 chefs d’État et de gouvernement venus assister aux obsèques d’Hugo Chávez [photo de la une] ont pénétré peu avant midi dans l’Académie militaire de Caracas, devant laquelle des dizaines de milliers de Vénézuéliens attendaient encore de pouvoir se recueillir devant le cercueil. La cérémonie s’est ouverte dans un roulement de tambour, suivi de l’hymne national, joué par l’orchestre symphonique Simon-Bolivar, dirigée par Gustavo Dudamel. Nicolas Maduro a ensuite déposé sur le cercueil une réplique de l’épée en or du libérateur sud-américain. Appelés un par un, les dirigeants présents ont été invités par groupes à former des haies d’honneur autour du cercueil. D’abord les plus proches alliés latino-américains, dont le Cubain Raul Castro, le Bolivien Evo Morales et l’Équatorien Rafael Correa, vivement applaudis par la foule ; ensuite, José Mujica, d’Urugay, ou Juan Manuel Santos, de Colombie ; puis les deux des alliés les plus controversés du régime chaviste, le Biélorusse Alexandre Loukachenko et l’Iranien Mahmoud Ahmadinejad.  Au terme d’une longue journée marquée par la célébration des funérailles du chef d’État défunt, l’ancien syndicaliste Nicolas Maduro, ancien vice-président d’Hugo Chávez et dauphin désigné, a prêté serment comme président par intérim. Le corps d’Hugo Chávez sera embaumé et exposé dans un cercueil de cristal. « Pour que le peuple vénézuélien puisse l’avoir avec lui pour l’éternité », a précisé Nicolas Maduro.

9 – GUATEMALA – Une cour d’appel du Guatemala a accordé une protection temporaire demandée par les avocats de l’ancien dictateur Efraín Ríos Montt, permettant au vieux général de renvoyer sine die le procès intenté contre lui pour des accusations de génocide et de crimes contre l’humanité. Le général devait être traduit en justice pour le meurtre de 1.700 indigènes de l’ethnie Quiche (nord du Guatemala), à la suite de la politique de la terre brûlée lors de sa fonction de chef de l’État du 23 mars 1982 au 8 août 1983. En janvier, le juge des crimes les plus à risque, Miguel Angel Vazquez, a déclaré que Efraín Rios a fait l’objet de poursuites, « après avoir conclu qu’il existe des preuves suffisantes de sa responsabilité dans les massacres commis contre des civils ».

9 – VENEZUELA – L’opposition vénézuélienne, regroupée au sein du Bureau de l’unité démocratique (MUD), une coalition de plus de 20 partis allant du centre-droit aux partis de gauche, a décidé à l’unanimité d’offrir à l’avocat Henrique Capriles 40 ans, gouverneur de l’État de Miranda, le soin d’être à nouveau leur candidat, lui qui avait recueilli, à la présidentielle du 7 octobre 2012, plus de six millions et demi voix, soit 46% des voix contre 54% de Chávez. Henrique Capriles a accepté publiquement l’offre du Bureau de l’unité démocratique de contester la présidence à Nicolas Maduro lors de la présidentielle fixée au 14 Avril. «C’est un moment très délicat», a reconnu José Ramón Medina, secrétaire exécutif de l’alliance de l’opposition. «Le plus grand inconvénient pour nous est la décision de la Cour suprême qui a permis à Maduro de devenir président par intérim, contrairement à ce que dit la Constitution. Le deuxième défi consiste à recueillir des fonds pour la campagne. Ici il n’y a pas de financement public des partis depuis 1999. Et puis il y a des contraintes factuelles et juridiques du secteur privé à contribuer à la campagne. Lors des élections d’octobre de nombreuses pressions ont été exercées sur les gens qui coopèrent. Le troisième inconvénient est que les funérailles sont devenues, sans aucune honte, un acte de prosélytisme électoral ».

Guy MANSUY