Aujourd’hui, on dénombre 8 055 cas confirmés, 373 morts et 2 556 personnes guéries en Argentine. Avec 44 millions d’habitants, l’Argentine fait partie des pays ayant le mieux géré la crise sanitaire due au Covid-19. Dès le premier cas de coronavirus enregistré dans le pays le 3 mars dernier, le président Alberto Fernández a déclaré un confinement obligatoire du 20 mars au 26 avril. Finalement, il se poursuivra jusqu’au 26 mai en passant par plusieurs étapes avant un retour à la normale. Ce confinement ne fut pas sans conséquences pour l’économie déjà fragile depuis des années.
Photo : Al Jayzira
Au pouvoir depuis le 10 décembre 2019, Alberto Fernández, ancien chef de cabinet sous les deux mandats Kirchner, a été mis à l’épreuve pour la première fois avec la pandémie actuelle. Si ses décisions ont permis de sauver la vie de nombreux citoyens argentins, le confinement de longue durée aura des répercussions sur l’économie. Les négociations sur la dette entre le gouvernement, ses créanciers et le FMI s’additionnent à la sortie de cette crise et doivent trouver une solution avant le 22 mai afin d’éviter la banqueroute.
Nous le savons, les effets du coronavirus sont avant tout de deux natures : humaines et économiques. Les deux sont intrinsèquement liées. Le défi des gouvernements est de trouver comment réussir à protéger sa population tout en protégeant son économie. Le chercheur en sciences économiques Richard Baldwin a travaillé sur une double courbe du coronavirus. Cette modélisation permet de mettre en relation les deux courbes épidémiologiques et économiques liées à la crise sanitaire. Ses travaux ont montré que pour que ces deux courbes s’aplanissent le plus possible, il faudrait prévoir une grande dépense fiscale. Une telle dépense devra être assumée par le gouvernement sur de nombreuses années car, ce faisant, il s’endette. C’est l’option qu’a choisi l’Argentine, pays déjà endetté depuis maintenant plusieurs années, en annonçant une relance économique de 11,1 milliards de dollars américains.
Le premier trimestre était pourtant encourageant. Avec des échanges commerciaux qui annonçaient 1 145 milliards de dollars en positif, l’Argentine enregistrait plus de bénéfices que de dépenses (ce qui n’avait pas eu lieu depuis 2010). La situation s’est vite détériorée avec l’arrivée de la pandémie. Il a fallu s’endetter davantage afin de rassembler les fonds suffisants et ne pas subir les effets directs du confinement. Cette tâche n’est pas facile pour ce pays qui depuis des années a bien du mal à convaincre les banques d’emprunter de l’argent à des taux intéressants. Plongée dans une crise économique, l’Argentine présente un indice de risque très important pour les investisseurs.
Alors que ses voisins latins ont réussi des prêts à taux intéressants, l’Argentine doit aujourd’hui négocier avec ses créanciers et le FMI afin de trouver des solutions rapides, au risque de perdre de nombreux investisseurs internationaux. Dans des moments de crise comme celui-ci, le rôle de l’État est d’assurer la sécurité de ses concitoyens. Pour l’Argentine, ceci s’est fait en prenant des risques certains d’ordre économique.
Pour Pepe Mujica, ancien président uruguayen, la pandémie actuelle va augmenter les inégalités en favorisant la concentration de l’argent dans les mains de ceux qui le détiennent déjà. En réussissant à endiguer l’épidémie au sein de son pays, le président argentin s’est endetté davantage et le futur du pays se lie toujours plus à celui de ses créanciers.
Étienne FAIVRE