Avec la chute du peso et une inflation de plus de 50% sur les douze derniers mois, l’Argentine s’enfonce dans la crise. Les mesures entreprises par le président Mauricio Macri n’ont pas permis d’inverser la tendance. Son avenir politique est de plus en plus compromis avec la possibilité d’un retour de Cristina Fernández de Kirchner.
Photo : Stephanie Maze
La situation économique et sociale en Argentine n’est guère florissante. Deux indicateurs clés illustrent les difficultés actuelles du pays : la chute du peso, qui a perdu la moitié de sa valeur en un an, et l’importante inflation de 55% sur les douze derniers mois. Ces données économiques se traduisent surtout par de grandes difficultés sociales vécues au quotidien par les Argentins. Les taux d’intérêts prohibitifs empêchent les classes moyennes d’accéder au crédit et la faim a refait son apparition. Désormais, 32% des Argentins sont pauvres. Ce taux de pauvreté est au plus haut depuis la terrible crise économique de 2001 qui hante encore les mémoires.
Plusieurs mesures prises par le gouvernement de centre droit du président Mauricio Macri devaient permettre de reprendre le contrôle sur la situation mais il n’en est rien. La contestation prend de l’ampleur pour critiquer les politiques d’austérité imposées par le Fonds monétaire international (FMI) à la suite de l’octroi du plus important prêt jamais accordé de 56 milliards de dollars. «L’Argentine n’est pas gouvernée par Macri mais par Christine Lagarde» ironisent les adversaires de M. Macri.
Le chef de l’État avait promis de rompre avec les méthodes dites «populistes» de sa prédécesseure Cristina Fernández de Kirchner (2007-2015). Il vient cependant de remettre au goût du jour la pratique du gel des prix des produits de consommation courante pendant sux mois, en dévoilant ce dispositif dans une mise en scène télévisée savamment orchestrée en s’invitant chez une famille de la classe moyenne. Ces méthodes rappellent davantage les pratiques d’un temps qui se voulait révolu, celui du kirchnerisme. Elles donnent surtout l’impression que le gouvernement panique à l’approche des élections présidentielles en octobre 2019 pendant que la cote de popularité de M. Macri dégringole.
Le retour de Mme Kirchner au pouvoir semble aujourd’hui une hypothèse de plus en plus probable. Alors qu’elle n’a pas encore annoncé sa candidature, les derniers sondages indiquent qu’elle gagnerait sans difficulté avec 46% des suffrages contre 36% pour Macri.
Selon M. Macri, la crise économique est liée directement à la méfiance des marchés, à l’incertitude électorale et à la peur d’un retour au pouvoir de Mme Kirchner, associée au populisme et au fantasme d’un nouveau défaut de paiement de la dette comme en 2001. Le FMI a en effet accordé à l’Argentine le plus gros prêt de son histoire parce qu’il avait foi dans les politiques libérales proposées par le gouvernement.
Finalement, Mme Kirchner jouit d’un avantage paradoxal. En gardant le silence sur sa candidature, elle reste omniprésente sur la scène politique. Plus son retour au pouvoir devient probable et plus les marchés financiers paniquent, rendant la tâche encore plus difficile pour le gouvernement Macri.
Pour l’instant, tout semble aller pour le mieux pour Mme Kirchner. Elle reste malgré tout sous le coup de la menace judiciaire, avec sa mise en examen dans onze affaires de corruption. Elle est pour l’instant protégée par son immunité parlementaire qui la met à l’abri d’une détention préventive alors que certains de ses proches sont d’ores et déjà en prison pour corruption.
Gabriel VALLEJO