Du roman à la poésie en passant par le théâtre et la nouvelle, Ana María Shua est essentiellement reconnue pour ses microfictions. Née en 1951 à Buenos Aires, elle prend le chemin de l’exil à Paris en 1976, alors que s’installe la dictature militaire. Ses premiers romans, Soy paciente (1980) et Los amores de Laurita (1986), sont célébrés par la critique lors de son retour et font l’objet d’adaptations au cinéma. En 1988 débute sa carrière dans la littérature pour enfants avec La batalla entre los elefantes y los cocodrilos. Contes du monde est le premier recueil de ses contes traduit en français.
Photo : La Opinión Diaria
Ces soixante contes du monde, venus des contrées les plus reculées, parfois même de civilisations oubliées, ont été retrouvés et remaniés par Ana María Shua. Au-delà de la construction d’un imaginaire qui lui est propre, l’auteure s’inscrit dans l’art de raconter des histoires caractéristique du continent latino-américain et, plus particulièrement, de l’Argentine, dont Borges a été un des pionniers.
Dès l’ouverture du recueil, nous partons à la découverte des meilleures histoires de la planète, afin de connaître les coutumes et le mode de vie des peuples qui les ont inventées. Du Kenya au Mexique, de l’Inde à l’Égypte, chacune de ces histoires, inédites en français, se lit alors comme une invitation au voyage.
Peuplées de personnages inquiétants, drôles ou magiques, de créatures étranges et exotiques, chaque récit tente de lever le voile sur les origines présumées du monde ou sur son fonctionnement. Et si les thèmes et les schémas narratifs sont universels, chaque peuple les a adaptés à ses coutumes. Ainsi les princesses mangent du riz en Chine et des pâtes en Italie, tout comme les pyramides et les sphinx parcourent les contes des Mille et une nuits. Avec humour et légèreté, l’auteure réactualise ces récits venus des contrées les plus reculées, parfois même de civilisations oubliées, afin de vous faire voyager simultanément à travers le temps et aux quatre coins du monde.
Ce recueil s’adresse aux enfants dès l’âge de 9 ans et les invite à développer leur perception du monde et du langage. Une belle lecture pour petits voyageurs, jeunes expatriés ou apprentis traducteurs. Cette édition bilingue permet de lire le texte original et d’en apprécier la traduction, et peut servir de support de cours pour l’enseignement de l’espagnol dans le secondaire et le supérieur.
Dirigée par Philippe Dessommes, José Carlos de Hoyos et Sylvie Protin, la collection «Ida y vuelta/Aller-retour» des Presses universitaires de Lyon se propose d’ouvrir des espaces de dialogue entre les cultures d’expression espagnole et française. Elle présente des textes encore inédits en français, principalement du domaine littéraire, en ne s’interdisant aucun genre (fiction, poésie, essai, critique).
Après Aucun lieu n’est sacré, un recueil de neuf nouvelles de Rodrigo Rey Rosa, inédit en français, composé durant son séjour à New York en 1998, et un roman, à la fois rigoureux et farfelu, de Carlos Gamerro, Le Rêve de monsieur le juge, publiés en 2017, Contes du monde est un des deux nouveaux titres en édition bilingue qui viennent enrichir la collection «Ida y vuelta/Aller-retour» des Presses universitaires de Lyon (PUL), avec le témoignage fictionnel de Saúl Ibargoyen autour de la dictature uruguayenne, Du sang dans le Cône Sud.
Marlène LANDON
Contes du monde d’Ana María Shua, traduit de l’espagnol (Argentine) par Mila Christel Bathurt, avec une préface de Jean-Yves Loude, Presses universitaires de Lyon, 536 p., 16 €. Ana María Shua en espagnol : Cuentos del mundo, Anaya.