La 68ᵉ Berlinale, Festival international du film de Berlin, qui s’est déroulée du 15 au 24 février, a mis cette année à l’honneur de nombreux films latino-américains, largement récompensés. Si le film roumain Touch Me Not d’Adina Pintilie a obtenu l’Ours d’or, le film paraguayen du réalisateur Marcelo Martinessi, Las Herederas, a quant à lui reçu l’Ours d’argent pour son actrice principale Ana Brun et le Prix Alfred Bauer, rendant ainsi hommage à une production qui « ouvre de nouvelles perspectives dans l’art cinématographique ».
Photo : Las Herederas
Las Herederas raconte l’histoire de Chela, une sexagénaire de riche famille qui, se rendant compte que son héritage ne sera pas suffisant, se voit alors contrainte de travailler comme chauffeuse de taxi pour personnes aisées. Cette nouvelle réalité perturbe l’équilibre imaginaire dans lequel elle vivait et l’oblige à modifier un monde demeuré jusque-là immuable.
C’est la première fois dans l’histoire du festival berlinois que le cinéma paraguayen est ainsi représenté, ce qui donne au succès de Las Herederas une importance toute particulière. Pour Ana Martini, directrice de la Casa Bicentenario Ignacio Nuñez Soler qui contient les archives audiovisuelles du Paraguay, « c’est un succès historique, un avant et après pour le cinéma paraguayen ». Elle a également souligné que le plus grand succès international du cinéma paraguayen a été atteint alors que le cinéma paraguayen n’est actuellement régi par aucun cadre juridique. Ce succès devrait accélérer l’approbation de la proposition de loi sur laquelle le secteur audiovisuel travaille depuis déjà deux ans. L’élaboration du projet de Loi de Développement de l’Audiovisuel est à ce jour en attente d’être traitée par la Chambre des Députés. « Nous sommes parvenus jusque-là sans aucune loi sur le cinéma, sans un Institut du cinéma, sans fonds […] mais nous avons besoin de cette loi, parce que nous avons besoin d’un cadre juridique qui puisse nous fournir les fonds nécessaires pour faire un cinéma paraguayen pluriel », a indiqué Ana Martini.
S’il nous semblait important de revenir longuement sur le succès du film de Marcelo Martinessi, il faut souligner que les autres pays d’Amérique latine sont loin d’être en reste dans le palmarès berlinois. L’Ours d’argent du meilleur scénario a été attribué à Manuel Alcalá et Alonso Ruizpalacios pour México, dont le rôle principal est interprété par Gael García Bernal. Tinta Bruta, film brésilien de Márcio Reolon et Filipe Matzembacher, a reçu la récompense de la Confédération Internationale de cinéma d’Art et d’Essai et le prix des Teddy (prix destiné aux films de sensibilité LGBT). Le Teddy du meilleur documentaire a été attribué à Bixa Travesty, des Brésiliens Claudia Priscilla et Kiko Goifman, présenté dans la section Panorama.
Le Brésil a également obtenu la mention spéciale documentaire pour Ex Shaman de Luiz Bolognesi. Le prix œcuménique a récompensé, dans la section Forum, Teatro de guerra de Lola Arias. Retablo, le film péruvien d’Álvaro Delgado Aparicio a reçu quant à lui le Teddy L’Oréal destiné aux jeunes talents, ainsi qu’une mention spéciale du prix Génération 14 plus destiné au jeune public. Le cinéma chilien a également été récompensé par le prix Caligari pour La casa lobo, film réalisé par Cristóbal León et Joacuín Cociña.
Léa JAILLARD
Alain LIATARD