Au cours d’un sommet rassemblant l’ensemble des chefs d’état latino-américains dans un hôtel luxueux et isolé de la Cordillère des Andes, Hernán Blanco, le président argentin, est rattrapé par une affaire de corruption impliquant sa fille. Alors qu’il se démène pour échapper au scandale qui menace sa carrière et sa famille, il doit aussi se battre pour des intérêts politiques et économiques à l’échelle d’un continent. Interprété par Ricardo Darín, à qui le réalisateur avait déjà pensé dès l’écriture du scénario, El Presidente était proposé dans la section « Un certain regard » à Cannes cette année.
Photo : El Presidente dossier de presse
On sait que Ricardo Darín est sans doute le meilleur acteur latino-américain. Il a joué de nombreux rôles de méchants au cours de sa carrière, mais le public le voit toujours comme le gentil de l’histoire. Il incarne à merveille le président argentin qui réunit des hommes et des femmes politiques qui se prennent pour des dieux, alors qu’ils ne sont que de petits insectes au milieu de l’immensité des Andes. L’hôtel où va se dérouler aussi un drame personnel nous fait penser à Shining de Kubrick (1980). Mais ce film n’a peut-être pas la force et l’originalité qu’avait Dolores Fonzi dans Paulina présenté il y a deux ans par ce réalisateur doué. L’interprétation est au sommet avec autour de Ricardo Darín, Dolores Fonzi, Elena Ayala (La piel que habito d’Almodovar), Daniel Gimenez Cacho (vu dans La Zona), Alfredo Castro et Paulina García (La Fiancée du désert).
Le réalisateur Santiago Mitre revient sur l’origine du projet El Presidente : « Mes deux précédents films avaient déjà trait à la politique : El Estudiante était un récit d’apprentissage politique, et Paulina évoquait l’engagement politique d’une jeune femme dont la vie était bouleversée par un événement tragique. J’ai souhaité aller encore plus loin avec El Presidente et faire le portrait d’une figure politique majeure, d’un homme dont la politique est le métier. J’avais envie de confronter sa vie publique et sa vie privée, de montrer l’homme derrière le politicien. Par ailleurs, mon père a longtemps travaillé pour le Mercosur, de fait il a beaucoup fréquenté ces sommets internationaux qui réunissent les puissants de ce monde. D’où l’idée d’inscrire le récit dans un tel sommet quelque part en Amérique latine. En revanche, je ne voulais pas faire un thriller politique. Nous avons choisi, avec Mariano Llinás mon coscénariste, d’amener le récit vers plus d’étrangeté, d’installer un climat proche du fantastique tout en étant ancré dans le réel.
D’une certaine manière, le politique a toujours quelque chose d’inquiétant, d’énigmatique. Il m’a paru intéressant de travailler le politique à partir d’une entrée différente. Généralement, quand on parle des politiques, on fait plutôt des thrillers ; ici, j’avais envie d’aborder le politique à travers des éléments fantastiques. Il faut savoir que je me sens héritier de la tradition de la littérature fantastique qui est extrêmement forte en Argentine. Le fantastique me paraissait donc être une très bonne manière d’apporter de l’étrangeté et de l’inquiétude dans ce milieu du pouvoir. Mes inspirations ont été autant Polanski que Kubrick ou Julio Cortazar. »
Si El Presidente est très réaliste dans son intrigue principale, « il faut dire que le film est à 100 % de la fiction, que ce soit les faits ou les personnages », confie Santiago Mitre. Évidemment, le réalisateur a fait des recherches, particulièrement sur tout ce qui pouvait concerner les détails organisationnels des sommets. Du reste, le propre père du cinéaste travaille depuis de nombreuses années pour des organisations internationales, ce qui fait qu’il y a eu beaucoup de conversations à table où il a pu entendre parler de tout ce monde-là. À voir à partir du 3 janvier prochain.
Alain LIATARD
Voir la bande annonce de El Presidente