Mardi 18 juillet dernier les Chiliens se sont réveillés apprenant l’approbation par le Sénat du projet de loi autorisant partiellement l’avortement. Après de longues heures de discussions et débats, celui-ci a été voté in extremis dans les cas de danger pour la vie de la mère, d’un fœtus inviable et de viol. Le parlement avait accepté la loi en première lecture en mars 2016. Ce projet de loi avait ensuite circulé par différentes commissions avant d’être voté par le Sénat le 18 juillet, qui y a apporté des modifications. La dépénalisation de l’avortement, est l’un des combats de la présidente socialiste Michelle Bachelet.
Au Chili, environs 120 000 avortements clandestins sont pratiqués, avec tous les risques qu’ils comportent pour les femmes. Les femmes qui le pratiquent ainsi que les femmes qui avortent au-delà de cinq mois encourent des peines allant de trois à cinq ans de prison. Cette loi même limitée, si elle est ratifiée serait historique au Chili et représenterait la récompense à l’infatigable travail des militantes dans chaque coin du Chili pour garantir le respect et la protection des droits de femmes. Mais, contre tout attente le lendemain de l’approbation par le Sénat, les députés ont stoppé le projet de loi. Il a été repoussé par une voix d’un député démocrate-chrétien. Le projet de loi devait pour sa ratification avoir les voix de 67 députés et il n’a obtenu que 66 à faveur, 40 contre et une abstention. La présidente Michelle Bachelet a exprimé son grand regret signalant qu’ « Il y a des urgences qui exigent un accord, et non pas un “vote idéologique ou religieux ».
Alors que le 70 % de la population soutient cette initiative de loi, les députés chiliens sont passés à côté de cette occasion historique. Le parlementaire qui a voté contre ou se sont abstenus « continuent à vouloir exposer de milliers de femmes et des jeunes filles à la terrible souffrance des avortements clandestins, et les privent de décider de leurs propres corps, santé et vies à cause des lois et politiques conservatrices » a déclaré, Erika Guevara-Rosas, directrice pour les Amériques d’Amnesty International. Le projet de loi est resté maintenant dans les mains d’une commission mixte formée par cinq députés représentant toutes les courants politiques. Ces derniers devront débattre notamment sur les articles qui ont posé des problèmes, notamment le rôle des parents dans le cas d’un avortement de mineures de quatorze ans victimes de viol, le droit à l’objection de conscience de médecins et des équipe médicaux.
A quatre mois des prochaines élections présidentielles, pour Michelle Bachelet l’approbation de l’IVG représente un grand enjeu. La ratification et puis la promulgation de la loi devrait se faire avant mars 2018, jour de la passation du pouvoir. Les parlementaires conservateurs pour leur part, ont annoncé d’ores et déjà qu’ils présenteront un recours devant le Tribunal Constitutionnel afin de freiner sa promulgation et ralentir la procédure. « On aurait pu changer l’histoire, il ne manquait qu’une voix à faveur », a indiqué le député de centre-gauche, Marco Antonio Nuñez. La porte-parole de la Corporation pour les droits sexuels et reproductifs, Claudia Dides, a exprimé son regret également : « Si le projet de loi avait été voté par l’Assemblée nationale, le Chili aurait quitté enfin la liste des pays que n’autorisent l’avortement sous aucune clause ». Sept pays de l’Amérique latine interdissent l’IVG : República Dominicana, Haití, Honduras, El Salvador, Nicaragua, Chili et Suriname.
Olga BARRY