Depuis 1999, la Revue Rue Saint-Ambroise est une référence pour un genre un peu trop mis à l’écart en France, la nouvelle. Il y a des lecteurs et des amateurs, mais les éditeurs souvent restent timides quand il s’agit d’en publier. Le monde anglo-saxon d’une part, l’Amérique latine d’autre part, sont restés des foyers de création du récit court. C’est ce qu’ont voulu démontrer les éditeurs de la revue qui nous proposent un numéro spécial Amériques.
Photo : site internet de la revue
Après un éditorial sobre et intelligent, d’une analyse pleine de finesse et d’acuité sur « la nouvelle et la crise du roman » par Bernardo Toro – écrivain d’origine chilienne, co-fondateur de la revue –, nous découvrons l’univers de quatorze écrivains fort différents les uns des autres par leurs pays d’origine, leur sensibilité, leur style. Cinq écrivains de langue anglaise (États-Unis et Canada) et neuf représentant plusieurs pays d’Amérique latine (Argentine, Chili, Cuba, Mexique et Pérou) se succèdent, dans des atmosphères variées, récits familiaux, parfois fantastiques, ironiques ou tout simplement littéraires. Un point commun, s’il faut en trouver un, pourrait être une nostalgie diffuse, l’idée de la mort et de la perte comme toile de fond. Dans plusieurs d’entre elles, le narrateur découvre une réalité qui transforme brusquement sa vie quotidienne.
Le remarquable choix de ces auteurs américains permet de mettre en évidence l’immense variété des tons employés, de façons d’écrire de chacun qui nous montre son univers particulier. Malgré l’évidente qualité de tous, cette très bonne sélection est dominée par la présence de Roberto Bolaño et sa nouvelle magistrale, Sensini. Une note biographique de chaque auteur, brève et complète, permet d’en savoir plus aussi sur leur bibliographie et ainsi de pouvoir prolonger le plaisir. Voilà une excellente occasion de découvrir des auteurs de première qualité et aussi de (re)découvrir toute la richesse que peut procurer la short novel et le cuento que les Américains savent apprécier bien mieux que nous.
Martine ROINAT