Ce jeudi 12 septembre, les unes des journaux mondiaux lancent à nouveau un avertissement concernant la situation critique de la forêt amazonienne. L’urgence est croissante face à la destruction continue de cet écosystème vital, menacé par la déforestation, les incendies et les effets du changement climatique.
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Selon les images satellites de l’Institut brésilien de recherches spatiales (INPE), ce sont près de 3 000 feux qui ont été comptabilisés au cours du mois de février dernier, 67 % de plus que les 1 761 feux enregistrés en février 2007, le précédent record. Depuis le début de l’année, ce sont près de 14 000 foyers d’incendie identifiés en Amazonie, le pire bilan dressé sur six mois en vingt ans. Rappelons-le, la forêt amazonienne constitue la plus grande forêt tropicale de la planète avec un des écosystèmes les plus cruciaux pour la stabilisation du climat mondial, aujourd’hui menacé par le réchauffement dû aux activités humaines. “Le facteur climatique joue incontestablement un rôle clé.” nous confirme Ane Alencar, directrice scientifique de l’ONG Institut de recherche environnementale d’Amazonie (IPAM Amazonia) auprès des agences de presse. Les experts s’accordent sur le rôle du changement climatique sur l’augmentation des feux de forêt : “Malheureusement, la plupart des biomes naturels brésiliens subissent un stress hydrique à cause du manque de précipitations. L’environnement devient plus sec, et une végétation plus sèche est plus vulnérable face aux incendies” explique Romulo Batista, porte-parole de l’antenne brésilienne de Greenpeace.
Une sécheresse historique qui a touché entre juin et novembre 2023 l’Amazonie. Dans le même temps, des millions de personnes dans tout le bassin amazonien ont aussi été affectées par cette sécheresse, attisant d’énormes incendies de forêt, réduisant les principaux cours d’eau et causant des ravages catastrophiques sur la faune. Ane Alencar parle d’un “stress” environnemental qui « produit toutes les conditions nécessaires pour que chaque incendie se transforme en grand incendie », même si elle estime que « les feux ont probablement été initiés par des personnes dans leurs travaux agricoles ». Des experts ont suggéré que le phénomène météorologique naturel El Niño pourrait être à l’origine de la sécheresse de 2023 en Amazonie, cependant une étude des scientifiques du World Weather Attribution (WWA) a toutefois conclu que le réchauffement climatique provoqué par l’activité humaine en était le principal responsable.
Cependant, d’autres causes sont à attribuer au nombre croissant de départs de feux en Amazonie. Romulo Batista nuance en disant : “la plupart des départs de feu ne sont pas spontanés, ou causés par la foudre” mais par “l’action humaine” selon lui, mettant en cause les techniques du brûlis (n.d.l.r. techniques visant à défricher une parcelle de forêt en la brûlant, pour la cultiver par la suite) pour l’expansion agricole. Les incendies d’origine humaine, directement liés à la déforestation, deviennent ingérables et menacent gravement ce précieux écosystème. La déforestation, principalement causée par l’industrie agro-alimentaire, est au cœur du problème. L’Union Européenne, quant à elle, porte une lourde responsabilité dans cette crise, étant à l’origine de 36 % de la déforestation mondiale liée au commerce de produits agricoles. Par exemple, la France importe plus de 3 millions de tonnes de soja pour nourrir son bétail, contribuant ainsi à la déforestation de régions comme l’Amazonie et le Cerrado.
Cette croissance des incendies a des conséquences bien réelles, en exemple le village de Paraizinho, en Amazonie brésilienne. La sécheresse historique de 2023 assèche le Rio Madeira, coupant les habitants de toute communication avec la ville voisine. Le fleuve, crucial pour le transport et l’approvisionnement, a atteint son plus bas niveau depuis 1967. Les villageois, notamment les plus fragiles, dépendent de bénévoles pour transporter de l’eau à pied sur les bancs de sable brûlant. La sécheresse, exacerbée par le changement climatique, impacte également la pêche, l’agriculture et aggrave les incendies de forêt, dont la fumée (en majorité d’origine criminelle) cause des problèmes de santé aux habitants. Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva mène des efforts pour réduire la déforestation en Amazonie. Il s’est engagé à éliminer la déforestation illégale en Amazonie d’ici 2030, un problème qui avait fortement augmenté sous son prédécesseur, Jair Bolsonaro.
Mirella CANEVAL
D’après les agences de presse