Le gouvernement de Daniel Ortega au Nicaragua a ordonné fin mai le gel des comptes bancaires de diocèses et paroisses dans tout le pays. L’Église catholique est accusée de blanchiment d’argent.
Photo : Prensa Libre
La tension entre le gouvernement du Nicaragua et l’Église catholique semble atteindre son paroxysme. Depuis fin mai 2023, neuf diocèses du pays font l’objet d’une enquête sur fond d’accusations de blanchiment d’argent. Ces enquêtes ont entraîné le gel des comptes bancaires des diocèses concernés, qui se voient donc retirer la possibilité de procéder à toutes transactions financières. Samedi 27 mai, la police nicaraguayenne a indiqué dans un communiqué avoir découvert des « centaines de milliers de dollars cachés dans des sacs, situés dans des locaux appartenant aux diocèses du pays ».
« Le blocage des comptes bancaires a commencé avec deux des diocèses les plus importants du Nicaragua, que sont le diocèse de Matagalpa et le diocèse d’Estelí. Le diocèse de Matagalpa est celui de notre évêque Mgr Rolando Álvarez, qui a été injustement et arbitrairement condamné à 26 ans de prison », a déclaré le 26 mai Félix Maradiaga, ancien candidat à la présidentielle au Nicaragua et président de la Fondation Libertad, à ACI Prensa. Selon ce dernier, « d’autres comptes bancaires d’organisations catholiques, comme les écoles, les universités et les centres de soins pour les personnes vulnérables ont également été gelés ». Pour ce militant, il s’agit d’une « énième attaque frontale contre l’Église au Nicaragua » et « d’un acte pervers de persécution religieuse qui révèle les véritables intentions du régime : faire taire la voix pastorale de l’Église ».
Plusieurs prêtres arrêtés
Au cours de cette même période, plusieurs prêtres ont été arrêtés. Mardi 23 mai, le père Jaime Iván Montecinos Sauceda, du diocèse de Matagalpa, est accusé de « porter atteinte à la souveraineté nationale », ainsi que les prêtres Eugenio Rodríguez et Leonardo Guevara, de Nueva Segovia et de la cathédrale d’Estelí, qui ont été arrêtés pour être soumis à des interrogatoires.
Si le gel des comptes bancaires des institutions ecclésiales a déjà eu lieu à plusieurs reprises, c’est la première fois que cette opération est aussi massive et généralisée, puisque tous les diocèses sont concernés. Le cardinal Leopoldo Brenes, archevêque de Managua, s’est exprimé sur cette tentative d’intimidation auprès du journal Despacho505. Informé des accusations gouvernementales par le biais des médias, et non via les autorités, il a affirmé que les comptes bancaires des diocèses et paroisses catholiques étaient pourtant bien en règle. « Nous analysons la situation », a-t-il dit, ajoutant que les évêques se réuniraient et fourniraient, plus tard, plus d’informations.
Les catholiques de plus en plus persécutés
Depuis l’arrivée au pouvoir de Daniel Ortega, l’Église catholique au Nicaragua, considérée par le pouvoir comme un soutien majeur aux opposants politiques du régime, subit une intensification des persécutions. Communautés religieuses expulsées, prêtres contraints à l’exil, processions interdites, fermeture d’universités catholiques et d’organisations non gouvernementales… Une étude publiée le 4 mai 2023 a recensé 3 224 actes d’hostilité commis contre l’Église catholique au Nicaragua depuis 2018. Cette hausse exponentielle des actes anti-catholiques a fait entrer pour la première fois le Nicaragua dans l’Index mondial de persécution 2023 de l’ONG protestante « Portes Ouvertes ». L’Amérique latine devient ainsi la région du monde où la persécution des chrétiens augmente le plus en 2023.
D’après Cécile Séveirac pour Aletelia