Malgré la mise en place d’une commission technique pour définir la date du prochain recensement national, au cœur du système de vote en Bolivie, les blocages continuent dans la région de Santa Cruz, engendrant pénuries et violences. Les évêques du pays appellent le gouvernement à assumer ses responsabilités.
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La région de Santa Cruz en Bolivie est désormais en grève depuis deux semaines pour exiger que le recensement ait lieu en 2023 et non en 2024 comme l’a établi l’exécutif national. Le recensement sert à recalculer la répartition des sièges au Congrès et les ressources publiques. Or la région de Santa Cruz, la locomotive économique de la Bolivie et la plus peuplée, gouvernée par l’opposition de droite, estime être défavorisée par un recensement obsolète datant d’il y a plus de dix ans.
Vendredi 4 novembre, le président bolivien Luis Arce a inauguré les travaux de la « commission technique », un organe mis en place pour fixer la date définitive du recensement de la population. Le chef de l’État a estimé que « comme rarement dans l’histoire du pays, les réponses techniques auront aussi une importance politique » et a critiqué le fait que le recensement ait été « politisé ». Le recensement devait avoir lieu en novembre prochain, mais le gouvernement d’Arce a annoncé en juillet qu’il serait reporté à 2024, invoquant des raisons techniques, ce qui a suscité des protestations, notamment à Santa Cruz. En réponse à la grève de Santa Cruz, les secteurs pro-gouvernementaux mènent un siège avec des barrages routiers qui ont isolé la région et l’ont laissée sans nourriture ni carburant, considérant que les protestations concernant le recensement visent à déstabiliser l’administration d’Arce.
Risques de pénurie
Les effets de la grève et des barrages routiers des manifestants se font maintenant sentir, notamment avec la pénurie de carburant et de denrées alimentaires. Le gouvernement bolivien a temporairement interdit l’exportation de six produits alimentaires de base en raison d’un « risque de pénurie ». Selon l’agence Fides, Víctor Hugo Valda Antelo, délégué épiscopal à la santé de l’archidiocèse de Santa Cruz et directeur général de l’hôpital catholique, a informé que la continuité des soins dans les hôpitaux catholiques est fortement menacée en raison du manque de carburant, qui empêche le transport des patients et gêne le personnel médical et infirmier, qui met tout en œuvre pour assurer des soins réguliers aux malades. Il a également lancé un appel aux autorités et en particulier aux personnes qui empêchent le carburant d’atteindre les pompes : « Au nom du Dieu de la vie, permettez l’approvisionnement en carburant et le passage des barrages routiers en priorité et immédiatement aux ambulances et aux transports hospitaliers, car ils sont essentiels pour continuer à sauver des vies ».
Jeudi 3 novembre, le Secrétaire général de la Conférence épiscopale bolivienne, Giovani Arana, a lancé un appel urgent au gouvernement pour qu’il « assume ses responsabilités et cherche des solutions aux conflits qui affligent le peuple bolivien en rétablissant la paix, la coexistence démocratique et en apportant une réponse urgente aux demandes du peuple, rapporte l’agence Fides. Dans le communiqué, intitulé « Nous sommes Boliviens », les évêques rappellent « l’escalade alarmante de la violence qui a lieu dans le pays, où des vies humaines sont mises en danger par des affrontements entre frères boliviens qui suscitent le ressentiment et la haine ». Ils rappellent ensuite les mots du Pape François dans l’encyclique Fratelli tutti, « l’amour construit des ponts », et réaffirment que la violence actuelle que connaît le pays peut avoir des conséquences fatales et irréversibles.
Le président Luis Arce, député sous l’ex-président de gauche Evo Morales (2006-2019), est confronté au premier conflit social majeur dans le pays depuis son arrivée au pouvoir il y a deux ans. En 2019, l’opposition de droite avait dénoncé des fraudes électorales et poussé l’ancien président indigène Evo Morales à la démission.
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